mardi 18 novembre 2025

1925-2025 : La philosophie clairvoyante de Rudolf Steiner a-t-elle encore un avenir ?

 

Perceval et Sigune ( Dornach )


Certainement que ce titre fera réagir les lecteurs connaisseurs de l'oeuvre de Rudolf Steiner. Et cependant il me semble approprié pour décrire ce sur quoi nous essayons de penser le monde sensible relié aux forces suprasensibles. 

Que faut-il entendre par " philosophie clairvoyante " ? c'est étymologiquement : l'amour pour la Sagesse tirée des mondes immédiatement supérieurs à notre monde physico-chimique et  dont les concepts qui sont proposés à notre penser actif doivent nous permettre de nous situer librement en ce monde pour le vrai, le beau et le Bien. A partir de ces déterminants il est incontestable que surgisse chez nombre de profanes le concept d'ésotérisme voire d'occultisme et par effet déformant sectarisme=emprise mentale ou financière = complotisme et tutti quanti !

C'est donc logiquement que ce mouvement , cette approche holistique se trouve encore aujourd'hui suspecte ou taxée péremptoirement de secte. Ses adversaires déclarés de quelques bords politiques ou confessionnels qu'ils soient la rejettent largement et ne veulent rien apprendre d'elle en dehors de ce que des "spécialistes" ou " d'anciens adeptes" disent d'elle surtout si c'est pour dénigrer à partir d'éléments déformés, tronqués ou mensongers !

La tentative de Steiner durant les vingt premières années du vingtième siècle et surtout après la fin de La grande Guerre, fût d'amener de nouvelles impulsions à dispositions des spécialistes dans leur domaines qui venaient prendre conseil auprès de lui. Cela à partir de connaissances profondément spirituelles ancrées dans les sciences humaines et la modernité de son temps afin de contrebalancer les forces matérialistes dont les effets n'ont eu de cesse d'exploser jusqu'à présent dans tous les domaines et surtout au sein de la psyché humaine avec les déséquilibres effrayants à notre époque comme jamais auparavant.

Je pense que l'humanité est à une croisée des chemins, une petite Apocalypse, dont chacun devra faire des choix douloureux : soit se fourvoyer dans un monde individualiste/communautariste/grégaire privé de toute héritage spirituel traditionnel authentique soit développer des forces de conscience qui elles sont des forces d'avenir et des forces christiques (en dehors de toutes confessions qui elles sont figées dans un dogmatisme et donc incapable d'évoluer). 

Une double tentation donc ! Renouer avec des forces du passé inadaptées à notre mentalité ou s'enivrer dans une virtualité techniciste dénuée de la réalité spirituelle qui soutient le monde et les règnes de la nature. les deux menant vers une impasse !

L'anthroposophie (ou connaissance de la sagesse divine en l'Homme ) n'est pas simple à appréhender et c'est bien cela aussi l'énorme écueil qui empêche sa diffusion dans le coeur et le mental des humains. Le monde moderne et son agitation détourne sans arrêt par ses loisirs  au sens ou le soulignait René Guénon des buts véritables de toute incarnation humaine. Le fait de se nourrir non pas seulement de pains  mais de se nourrir de toutes paroles et de connaissances qui l'élèvent réellement à son rang de créature divine et lui permettent de créer en harmonie avec le vivant! Qui le réifient donc !

Dans toute tradition spirituelle authentique, il faut en extraire la quintessence du noyau lui-même soustrait à la vision réelle de par l'écorce, la gangue qui enveloppe la vraie réalité. De ce qui est éternel en l'Homme : que ce soit en alchimie, théosophie, philosophie gnostique, etc . Et le joyaux issu de l'anthroposophie est à la fois un rappel à ce que décrit l'Evangile et l'importance accordée à la force de notre penser dès lors que notre Je pense vraiment. Car la nature même de notre penser est spirituelle.

L'autre écueil est la sujétion à Steiner comme à un gourou dans une attitude de soumission en l'autorité. Là est la grande tentation au sein même des structures existantes qui s'occupent d'anthroposophie. Une forme d'idolâtrie non consciente (mais qui pétrifie toute nouvelle connaissance spirituelle qui pourrait pourtant compléter les apports de RS et orienter les chercheurs et praticiens vers de nouveaux horizons) et pousse même des interlocuteurs ou étudiants de longue date une simple régurgitation des affirmations du "Maître" sans s'apercevoir qu'ils tombent dans la foi en la croyance aveugle et une forme d'illusion de soi ! Par cette démarche, on se détourne une fois de plus de notre propre auto-initiation et du caractère épistémologique tel que "La Philosophie de la Liberté " nous invite à suivre avec insistance mais que très peu comprennent !!!

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L'avenir de l'Homme et d'une nouvelle anthroposophie passera par la figure christique de Perceval (Parzifal) telle que l'ont dépeinte Chrétien de Troyes ou Wolfram Von Eschenbach que je vous enjoins à redécouvrir et qui fera l'objet d'une prochaine étude sur mon blog !

Pour approfondir et conclure ce court article, je renvoie à l'article paru sur aether.news :

https://www.aether.news/enjeux-de-l-anthroposophie-aujourd-hui/



lundi 3 février 2025

Les fondements gnoséologiques de la liberté

 



De toutes les œuvres écrites par Rudolf Steiner, Philosophie de la liberté (1894) restera comme la pierre de l’édifice de toute sa vie. Comme il confiera à Walter Johannes Stein (philosophe autrichien, pionnier de la diffusion de l’anthroposophie et historien du courant historique du Graal) qui lui demandait ce qui subsisterait de son œuvre dans quelques siècles : « Rien !… Sauf La philosophie de la liberté, mais à partir d'elle, le reste peut être retrouvé. ». C’est dire si cet ouvrage était absolument central à ses yeux ! Au chapitre X, de son autobiographie (1) parue à la fin de sa vie, il  nous confie ceci :

" Lorsque je revois les trois premières décennies de mon existence, j'ai l'impression de les avoir menées jusqu'à un certain aboutissement. A la fin de cette époque je partis pour Weimar où, pendant près de sept ans, j'allais travailler aux Archives de Goethe et Schiller. Le temps passé à Vienne, depuis mon premier voyage à Weimar jusqu'à mon installation dans la ville de Goethe, peut être considéré comme une période où j'ai, dans une certaine mesure, pu trouver une conclusion aux aspirations profondes de mon âme. Cette maturation allait conduire à l'élaboration de ma « Philosophie de la Liberté». Un aspect essentiel de ma conception d'alors concernait le monde sensible qui, pour moi, ne constituait pas la véritable réalité. Dans mes écrits et articles de cette époque, je n'ai jamais manqué de souligner que la vraie réalité appartient à l'âme, grâce à l'action de la pensée qu'elle ne puise pas dans le monde physique, mais qu'elle exerce sous forme d'une activité affranchie de toute perception sensible. Je considérais que grâce à cette pensée « libérée des sens » l'âme pouvait participer à l'essence spirituelle du monde. Mais j'insistais également, et avec force, sur le fait que l'homme, vivant dans cette pensée libérée des sens, a pleinement conscience de puiser à l'essence spirituelle fondamentale de toute existence. Parler des limites de la connaissance c'était, selon moi, avouer que l'on n'avait pu expérimenter en esprit la véritable réalité, d'où il devenait impossible de retrouver cette dernière dans le monde perceptible. Je voulais montrer que ce n'est pas en se frayant un passage vers l'extérieur que l'on trouve la vraie réalité, mais par une démarche conduisant vers la vie intérieure de l'homme. Celui qui s'efforce de percer vers le dehors pour constater l'impossibilité d'un tel cheminement, invoque alors des « limites de la connaissance». Or, cette impossibilité n'est pas due à la limitation, chez l'homme, de la faculté de connaître; elle s'explique par le fait que la recherche porte sur une chose dont toute introspection sérieuse prouve l'inexistence. En poussant plus avant dans le monde des sens, on cherche en quelque sorte un prolongement du sensible au-delà du monde perçu; C'est comme si, vivant dans des illusions, nous voulions aller chercher dans de nouvelles illusions les causes des premières. Le sujet de mon raisonnement était alors le suivant: dès sa naissance et tout au long de son existence l'être humain développe son besoin de connaître le monde. Il parvient d'abord à la contemplation du sensible. Mais ce n'est là qu'une démarche préliminaire à la connaissance. La perception ne permet pas de dévoiler tout ce que contient le monde. L'essence du monde est cachée; dans un premier temps, l'homme n'accède pas jusqu'à cette essence. Il demeure d'abord fermé à une telle réalité. Tant que l'homme s'en tiendra à la seule perception sensible, il se trouvera toujours face à un monde illusoire.

Par contre, si au fond de son être la pensée libérée du sensible vient se joindre à cette perception sensorielle, l'illusion s'imprègne de réalité; elle cesse d'être une simple illusion.

L'esprit humain, prenant conscience de soi, rencontre alors l'esprit du monde, qui ne se dissimule plus derrière le sensible, mais apparaît comme agissant au sein même de celui-ci. Je considérais que l'homme peut parvenir lorsqu'il progresse et s'élève de la perception sensorielle à l'expérience de la pensée libérée du sensible. La contemplation de l'idée au sein du réel constitue la vraie communion de l'homme.

La pensée a la même importance à l'égard des idées que l'oeil à l'égard de la lumière, ou l'oreille à l'égard des sons. C'est un organe de perception. Il m'importait peu, à cette époque, de décrire le monde de l'esprit; je voulais démontrer que la nature perçue par nos sens est d'essence spirituelle, et exprimer qu'en réalité la nature est esprit. Le destin m'avait conduit à me confronter avec les théories de la connaissance en cours. Les philosophes supposaient au départ une nature dépourvue d'esprit, et se donnaient pour tâche d'examiner dans quelle mesure l'homme a le droit d'élaborer en lui-même une image spirituelle de la nature. Je leur opposais une toute autre théorie de la connaissance. Je voulais montrer que l'homme, en pensant, n'est pas un spectateur qui se forme, du dehors, des images de la nature, mais qu'il se trouve en pensée dans les choses mêmes, participant ainsi à leur essence grâce à l'expérience réalisée par l'acte de connaissance.

C'est encore mon destin qui m'a amené à élaborer mes propres conceptions à la suite de celles de Goethe; lui aussi avait aspiré à une conception spirituelle du monde. A maintes occasions il met en évidence le caractère spirituel de la nature. Je tenais ensuite à expliquer mon idée concernant la liberté. Tant que l'homme agit sous la poussée de ses instincts, désirs et passions, etc ... il n'est pas libre. Dans ce cas ses actes sont déterminés par des pulsions devenues aussi inconscientes que les impressions du monde sensible. Ce n'est cependant pas encore sa véritable nature qui agit. Son humanité profonde ne se dévoile pas à ce niveau, pas plus que l'essence de la nature ne se révèle à l'observation purement sensible. Le monde sensible n'est pas vraiment une illusion, mais le devient par le fait de l'homme. Ce qui en lui est spirituel n'agit réellement que si les mobiles d'action sont puisés dans le domaine de la pensée libre et affranchie du sensible, sous forme d'intuitions morales. A ce niveau, c'est lui qui agit et non quelque chose d'autre. Il est alors un être libre, un être qui agit de sa propre initiative. Je voulais montrer qu'en refusant d'admettre la pensée dégagée des sens comme étant un élément purement spirituel dans l'homme, on ne pourra jamais comprendre ce qu'est la liberté; or cette compréhension se fait dès l'instant où l'on a saisi la réalité de cette pensée affranchie du sensible. Il s'agissait moins pour moi de décrire le monde spirituel dans lequel nous faisons l'expérience de nos intuitions morales, mais bien plutôt d'avoir à souligner le caractère spirituel de ces intuitions : « L'esprit libre agit selon ses impulsions propres, c'est-à-dire selon des intuitions que la pensée choisit parmi l'ensemble de ces idées». Celui qui ne se tourne pas vers un monde purement spirituel, et donc ne pourra justifier cette première phrase, ne pourra pas davantage admettre pleinement la seconde. Or, la Philosophie de la Liberté contient un bon nombre de passages se référant à la première thèse, par exemple: « Le stade le plus élevé de la vie individuelle est celui de la pensée conceptuelle sans rapport avec un quelconque contenu perceptif. Nous déterminons le contenu d'un concept par une intuition pure, nous le tirons de la sphère idéelle. Un tel concept n'a de rapport avec aucune perception donnée». Il s'agit ici de «perception sensible». Si j'avais voulu parler, à cette époque, du monde de l'esprit, et non pas seulement du caractère spirituel des intuitions morales, j'aurais dû tenir compte du contraste qui existe entre une perception sensible et une perception spirituelle. Mais il m'importait alors seulement de souligner le caractère non-sensible des intuitions morales. "

Voici remarquablement exposé ce qu’il esquissera par écrit dès 1892 à travers sa thèse de doctorat Vérité et science  et plus largement dans Philosophie de La Liberté (1894) alors qu’il avait 33 ans ! Kant encore considéré en son temps comme le père fondateur de la théorie de la connaissance développait l’idée suivante : scinder la connaissance en deux parties : Les phénomènes d’une part, les noumènes inaccessibles d’autre part, et il fait ceci aussi avec le sujet, en distinguant le sujet en soi inconnu : le Je transcendantal, du sujet connu : le je empirique. Mais si l’objet en soi et le sujet en soi étaient vraiment inconnaissables, tant notre conscience, que notre soi-conscience seraient alors illusoires ! Le contenu du monde nous est originairement donné sous une forme incomplète, une forme qui ne renferme pas la totalité de ce contenu , mais qui possède au contraire une seconde partie essentielle qui est produite par la pensée. Les deux réunies forment la réalité par l’acte de connaissance. C’est bien le Je individuel qui pose l’acte de connaissance d’une part, bien que la pensée la plus pénétrante ne peut , dans n’importe quel domaine, avoir d’effets fructueux si elle n’accède pas à la forme conceptuelle juste (on dira la catégorie, l’idée) qui complétant le donné (la perception ) nous livre la réalité. Pour reprendre le mythe de la Caverne, Kant s’est arrêté à l’homme enchaîné dans un Royaume où seules les ombres de la réalité et de soi lui parviennent. Mais comme le suggérait Platon, initié aux anciens Mystères, plus l’Homme remonte vers la source lumineuse des pensées et du monde spirituel plus il est en capacité de contempler la vraie réalité : sensible mais aussi suprasensible comme nous le verrons. Le fait mystique d’une part, les longues traditions ésotériques orientales comme occidentales remontant aux philosophes grecs d’autres part démontrent une réalité par-delà le monde des sens. Si le donné immédiat (percept) et la forme conceptuelle correspondante sont réunis par le Je dans le processus de connaissance, l’union de ces deux éléments de la réalité qui sont autrement toujours séparés dans la conscience ne peut être produite que par un acte de liberté. L’opposition entre sujet et objet, ou entre l’esprit et la matière, on la projette en général sur le monde, au point d’en arriver à croire qu’elle est le fruit de la manière dont est fait le monde, et non pas, comme il serait juste, de la façon dont nous, nous sommes faits, de la manière dont le sujet appréhende l’objet. On se demande quel rapport il y a, en dehors de l’homme, entre l’idée et la réalité sensible, sans considérer qu’en dehors de l’homme, il n’y a aucune réalité sensible privée d’idée. Seul l’homme peut en effet séparer l’idée du monde sensible et se représenter ensuite une nature privée d’idée. L’énigme du monde et celle de l’homme ne sont donc qu’une et même énigme ! Connais-toi toi-même et tu connaîtras le monde, connais le monde et tu te connaîtras toi-même » !

Pour Goethe, la connaissance est vraie seulement quand elle est féconde : à savoir quand elle parvient à améliorer autant l’homme que le monde (Chap.9  de son Autobiographie) : Steiner s'est rattaché à l'idée d'évolution de Darwin qu'il a qualifié "d'acte spirituel le plus important de la seconde moitié du 19ème", tout en  poursuivant sa démarche pour ce qui est des possibilités d'évolution psychique et spirituel de l'être humain, donc dans son domaine à lui. Cela l'a conduit, selon sa propre expression, à la pensée de la réincarnation de l'esprit humain, et il en appela pour ce faire à la pensée en métamorphose de Goethe.

Lessing en avait envisagé l'issue en conclusion de son Education du genre humain dans laquelle il reliait l'idée d'immortalité à celle de réincarnation. Il existe donc pour Steiner, au sein du monde dont on peut faire l'expérience, une expérience spécifique que l'on fait dans sa propre pensée quand on "accueille" et non pas quand on fabrique des concepts et des idées qui, seuls, rendent compréhensibles les données des sens : La pensée, en effet perçoit la cohérence des données de la même façon que les organes sensoriels perçoivent ces données elles-mêmes. Pour résumer : Les monismes abordés donc dans sa Philosophie de la Liberté comme positions philosophiques peuvent finalement prendre 3 formes :

1– Seules existent la matière et les énergies mortes qui accompagnent celles-ci. La première conception est celle que défendent aujourd'hui la plupart des scientifiques ( du moins officiellement = matérialisme ). La matière contient déjà l'esprit; elle est capable de s'auto-organiser comme le définit la biologie actuelle, cachée sous la formule "d'auto-organisation de la matière".

2– Seule existe la conscience, et le monde que nous percevons n'est là qu'à titre hypothétique, car tout est esprit. La deuxième conception a été soutenue par Berkeley et Kant = réalisme transcendantal et/ou métaphysique.

3 -En dehors de l'être humain, le monde appréhendé par le corps et le monde appréhendé par l'esprit ne sont pas séparés. En l'homme, cependant, ils apparaissent comme une dualité et doivent être de nouveau réunis par lui : c'est en cela que consiste l'activité de connaissance : Alors que les deux premières forment représentent des formes statiques, la troisième est dynamique, c'est celle que défend Steiner : le monisme est le contenu UN du monde. Dans l'homme, ce contenu "Un" se dissocie pour apparaître de façon dualiste, d'un côté : comme donné sensible (perception des phénomènes),, de l'autre, dans le penser humain (concepts). L'acte de connaissance, chaque fois neuf consiste à réunir ces deux aspects de la réalité.

La science de cette liberté une fois introduite par la gnoséologie s’ouvre alors le champ de la réalité de la liberté : Est-ce pour cela que tous ceux qui nient la liberté nient aussi le sujet ? À partir du moment où il s’agit d’une même réalité, l’on ne peut pas nier la liberté sans nier le sujet et l’on ne peut pas nier le sujet sans nier la liberté.”. Une action est morale seulement quand est moral le sujet qui l’accomplit ; et le sujet qui l’accomplit est moral seulement quand c’est vraiment le sujet, à savoir le Je. Il ne s’agit donc pas de soutenir le Je par les principes moraux ( des Commandements “divins” par exemple) , mais bien plus de soutenir les principes moraux par le Je.

Tout comme sur le plan juridique, on fait dériver de la loi les soi-disant « règlements d’exécution », de même, sur celui moral, on fait dériver de la loi, des principes ou des commandements, toute une série de préceptes visant à régler les comportements quotidiens. Selon Soloviev, un but de la morale est justement celui d’unir les êtres spirituels par un lien libre et profond, et l’unique lien de ce type, qu’est l’amour.

Ce qui signifie que l’amour est vraiment seulement l’amour quand le Je est vraiment le Je. “ La nature ne fait de l’homme qu’un être naturel ; la société en fait un être qui agit selon des lois ; mais un être libre, il ne peut le faire que de lui-même ».(R.S)

La moralité d’un collectif dépend donc de celle des individus qui le composent. Une vraie socialité ne peut pour cette raison exister que dans une communauté « d’esprits libres ».  Vivre dans l’amour de l’action et laisser vivre dans la compréhension de la volonté d’autrui, c’est la maxime fondamentale des hommes libres ! Si le monde spirituel ou des idées est Un, les intentions les plus profondes de deux « esprits libres » ne peuvent en effet que concorder. Un homme libre n’exige pas d’un autre, une concordance, mais il l’attend, puisqu’il sait bien qu’elle est inhérente à sa nature la plus profonde et la plus vraie. En mettant la pensée en mouvement, le Je peut en effet saisir ce mouvement pendulaire vivant qui remonte sans cesse, par voie inductive, de l’individuel à l’universel et descend, par voie déductive, de l’universel à l’individuel.

La connaissance nous donne la vérité, la vérité nous donne la liberté, et la vérité et la liberté nous donnent « l’esprit libre », à savoir l’être humain :

«  Liberté ! nom accueillant, nom humain, toi qui contiens en toi tout ce qui est cher à la moralité, que mon humanité estime au plus haut point et qui ne fais de moi l'esclave de personne, toi qui ne te contentes pas de poser une loi, mais qui attends ce que mon amour moral reconnaîtra lui-même comme loi, parce qu'en face de toute loi qui ne lui est qu'imposée il se sent non-libre. » (Philosophie de la liberté– p.168 aux Editions Novalis

 

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   Hommages à Lucio Russo (philosophe italien et historien des sciences et grand connaisseur de l’anthroposophie et de la Philosophie de la Liberté qui a consacré sous forme dialectique une remarquable synthèse dudit ouvrage qui nous aura permis de rendre clair certains concepts de Rudolf Steiner; Il a laissé un ouvrage aux Belles lettres : Notre culture scientifique: Le monde antique en héritage) . Rudolf Steiner qui aura eu le mérite de réhabiliter une philosophie moniste réaliste où le dualisme apparent illusoire de notre condition humaine disparaît devant la nature spirituelle du monde des idées (concepts). 

 

 

jeudi 31 octobre 2024

New-Age versus Anthroposophie

 



A une époque où la spiritualité et l'ésotérisme sont considérés comme perte de temps, la confusion entre New-Age et l'école de science de l'Esprit christique incarnée au 20ème siècle par Rudolf Steiner est savamment entretenue. Le New Age est un mouvement spirituel et culturel qui a émergé dans les années 1970. Il englobe une variété de croyances et de pratiques qui cherchent à promouvoir la croissance personnelle, et une vision holistique de la vie. Le New Age intègre souvent des éléments de différentes traditions religieuses et philosophiques, y compris le bouddhisme, le taoïsme, le christianisme mystique, et les philosophies orientales. Les adeptes du New Age peuvent s'intéresser à des pratiques telles que la méditation, la guérison énergétique, l'astrologie, la spiritualité environnementale, et d'autres formes de développement personnel. Ce mouvement prône généralement l'idée que l'individu a le pouvoir de créer sa propre réalité et d'évoluer spirituellement.

Quelques indices concrets de cette confusion d'avec l'anthroposophie :

  • - L'ignorance et l'orgueil derrière lesquels se cachent de nombreux hermétistes ou occultistes pour la dénigrer tout en se défendant de l'avoir suffisamment lu et éprouvé.
  • - Médias et influenceurs d'extrême-gauche très souvent agnostiques ou athées englobant dans le même sac tout ce qui pose l'existence d'une nature cachée derrière le monde sensible.
  • l'attitude des grandes formations religieuses qui rejettent an nom des Canons institués tout ce qui pourrait compromettre ou réévaluer ces mêmes dogmes 


Tout ce bric-à-brac , ce fourre-tout de l'ésotérisme dans ce qu'il a de décadent et sans lien avec aucune forme religieuse éprouvée ne peut conduire qu'à des impasses ou une forme d'errance inéluctable sans aller à l'Essentiel ! C'est donc un procès d'intention un peu facile que d'assimiler Steiner à ce que René Guénon connaisseur en partie du soufisme et de l'Islam comme des religions hindoues et de l'ésotérisme chrétien a pu en dire du courant théosophique et des allégations reconnues mensongères par la société psychique elle-même sur laquelle il s'appuyait pour décrédibiliser Blavatsky ou Steiner. " (1) (2) (3)

Mais comme le citait Francis Bacon : " Calomniez ! Calomniez ! Il en restera toujours quelque chose !

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Concrètement, le syncrétisme New-Age actuel ne retient que des connaissances tronquées d'une connaissance traditionnelle issue de l'Orient et qui s'est figée dans le temps pour un développement personnel insistant sur des pouvoirs psychiques et le renforcement de l'ego. C'est un travail tout autre qu'impose une véritable spiritualité dans laquelle s'inscrit l'anthroposophie !



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Il faut rajouter à ces déterminants du New-Age , une autre origine bien plus ancienne avant qu'elle ne soit dévoyée au cours du XXème siècle. La Renaissance en Occident comme son appellation l'indique fût un renouveau culturel , philosophique et scientifique, religieux et scientifique.. Bref ! Un souffle de liberté inextinguible ! Lorsqu'au début du 19ème siècle, la connaissance des grands cycles et des quatre grands Âges ( Or, Argent, Airain et de Fer ) tirées de la Sagesse orientale se fît jour, le concept de Kali-Yuga sera le ferment d'un attrait pour une nouvelle ère ( celle du Verseau ) succédant à notre âge de fer mourant par la faute d'un matérialisme étouffant le développement spirituel des individus.
Cette ère du Verseau assimilée à celle du Nouvel-Âge sera introduite (en France) par l'ésotériste Paul Le Cour fondateur de la revue Atlantis. De nombreux astrologues selon qu'ils font intervenir l'astrologie sidérale ou tropicale selon la culture Orientale ou d'Occident ne seront pas totalement d'accord sur le commencement de cette ère prochaine. Une autre occultiste britannique contemporaine de Paul Le Cour influencée médiumniquement par un maître tibétain, Alice Bailey en livrera quelques ouvrages faisant revenir le Christ sur Terre à la manière des Témoins de Jéhovah tout comme Benjamin Creme. Prophétie anti-christique mais qui aura une énorme influence sur les mouvements hippies autour de San Francisco dans les années 1960/1970 et l'importation d'une spiritualité orientale avec ses gourous comme figures inspirantes pour de nombreux artistes anglo-américains. 

Le mouvement New- Âge picorant de ci-de là au sein des traditions et courants de pensées ésotériques surtout orientales et bouddhistes , certains hermétistes ont vu dans le corpus légué par Steiner une sorte de syncrétisme puisant allègrement dans la théosophie de Blavatsky comme dans l'héritage des philosophes de la nature souabes. C'est oublier un peu rapidement que toute tradition s'est toujours renforcée et développée par l'apport d'autres courants de connaissances occultes et une connaissance mystique supérieure telle que Steiner l'a décrite au travers ses ouvrages sur le sujet. (4) Concernant l'idée de syncrétisme au sein de courants hétérodoxes qui se détacheraient des institutions traditionnelles, c'est effectivement le cas du soufisme iranien au contact de l'héritage perse mazdéen et du néoplatonisme, de l'Hermétisme qui tire ses enseignements de tout l'héritage grèco-égyptien issu d'Alexandrie et du bassin méditerranéen ! De la Kabbale chrétienne à la Renaissance, prenant appui sur celle de ses frères juifs pour mieux y intégrer le Christ ou l'Archange Michaël (Métatron) dans son système doctrinal ! De l'enseignement de Gurdjieff qui à travers ses rencontres et sa pratique a rassemblé des morceaux épars issus des traditions ésotériques pythagoriciennes et ismaéliennes ou chrétiennes !

En fait, selon les calculs de Steiner, l'humanité se trouve toujours dans l'ère des Poissons jusqu'en 3573 environs. Selon Rudolf Steiner, porteur du chemin de connaissance appelé Anthroposophie, l'ère des Poissons a débuté en 1413 et s'achèvera en 3573 apr. J.-C. Elle commence bien après la date suggérée par la majorité des astrologues, au milieu du point vernal et non à son début. Donc rien à voir avec les annonciateurs d'un nouvel âge déjà présent ou à venir immédiatement ! De plus, ce concept de New-Age tout comme l'importation de la fête d'Halloween servent tous deux des intérêts marchands considérables qui n'ont rien à faire avec une véritable recherche spirituelle. 

France Culture a consacré en 2021 une émission à charge en prenant soin d'inviter Jean-Baptiste Malet et un sociologue pour cibler et insister par l'accusation sectaire, de la façon la plus légère et anachronique qui soit, le mouvement New-Age et l'anthroposophie. Rappelons que Malet se basant sur l'ex-anthroposophe G.Perra (accusé d'avoir eu lettre personnelle à l'appui, un comportement déplacé sur une de ses élèves à l'époque- déplacement qui n'aura choqué aucun des journalistes de France Culture cela va de soi pour la gauche bien-pensante), se sera auparavant attaqué aussi à Pierre Rabhi et son association Colibri proche des idées pratiques liées à l'agriculture biodynamique. Rappelons que le fils de Mme Tavernier ex-Présidente de l'UNADFI a fait sa scolarité au sein des écoles Steiner et prenant la défense de cette pédagogie est taxé lui aussi d'emprise sectaire à présent ! CQFD ! 

On notera les faux griefs contre Steiner :

- Steiner et les anthroposophes sont anti-modernes donc anti-progrès donc anti-science ! Faux ! Celui-ci ne niait pas la science matérialiste mais délimitait son champ de recherches comme l'ont fait Rupert Sheldrake ou dernièrement les auteurs du livre : Dieu et la Science !

- Secondo : Steiner n'était pas pangermaniste ni associé au mouvement volkisch contrairement à Nietzsche ou Wagner ou des ariosophes qui influencèrent le NSDAP par la suite.


Les auditeurs sérieux et connaisseurs un minimum apprécieront la teneur de l'émission relevant nombre d' allégations mensongères, de contre-vérités pour effrayer l'auditeur lambda en pensant qu'ils font autorité pour informer scrupuleusement tout en mettant sous le boisseau toute information qui contredirait leurs affirmations. Le but - inavouable publiquement, est donc d''empêcher le citoyen de s'informer librement, de réfléchir par lui-même, de se confronter aux faits contradictoires par rapport aux discours et en tirer des conclusions qui remettraient en cause l'autorité des " sachants" et autres experts de plateaux ! On a vu ce que cela donnait sous l'URSS et tout autre régime totalitaire. 
Ces intervenants là sont porteurs de biais cognitifs aux propositions très souvent radicales qu'ils dénoncent chez leurs adversaires par ailleurs ! Mais tant qu'ils sont payés pour soutenir le pouvoir central dominant au service de l'information dominante peu importe la balance entre ce qui est vrai de son contraire !
On attend avec impatience trois ans après, une émission impartiale sur la gestion néototalitaire de l'épisode Covid par l'employeur ou superviseur en chef de France Culture !!! Notre cher Jupiter ! 😂 ...Mais là point de dérive sectaire ....


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" Si vous faites Un pas vers La Connaissance occulte, faites en Trois par vers la Connaissance et l'amélioration de soi "

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Si tu veux te connaître toi-même,
Ouvre les yeux de tous côtés sur l’univers.
Mais si c’est l’univers que tu voudrais connaître,
Jusqu’au fond de toi-même plonge alors ton regard.

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samedi 20 janvier 2024

Kaspar Hauser ...Ce qu'en a dit Rudolf Steiner !

 




L’histoire de Kaspar
 
L’étrange histoire de Kaspar Hauser commence le 26 mai 1828. C'est par cette journée de Pentecôte que deux artisans de Nuremberg, discutant à la Place du Suif, voient apparaître un jeune garçon étrange. L'adolescent est mal vêtu et sa démarche laisse croire qu'il est ivre, ou complètement idiot. Il tend aux deux compagnons une lettre adressée à Monsieur le capitaine commandant le 4e escadron du régiment de chevau-légers.
Le jeune homme demande à être conduit chez le capitaine de la cavalerie. On l'amène plutôt au poste de police de la Porte-Neuve. Puis, en compagnie des artisans et de policiers, il se rend chez M. von Wessening, le capitaine des chevaux-légers. Les hommes prennent alors connaissance du contenu de la lettre. Elle contient deux billets. Le premier des deux messages, écrit par l'homme qui a élevé Kaspar Hauser, débute ainsi : « Très honoré monsieur le capitaine, Je vous envoie un garçon qui voudrait servir fidèlement son roi et qui l'a demandé. Ce garçon m'a été confié en 1812, le 7 octobre, et je suis moi même un pauvre journalier, j'ai moi-même dix enfants, j'ai moi-même assez de peine à me tirer d'affaire, et sa mère m'a confié l'enfant pour son éducation ».
L'auteur du billet avoue qu'il n'a jamais déclaré l'enfant aux autorités et qu'il ne lui a jamais permis de sortir de sa maison. En fait, Kaspar était retenu prisonnier et n'avait aucun contact avec l'extérieur. Le désir le plus profond de Kaspar est de devenir cavalier, comme son père. Désespéré, l'ouvrier a abandonné Kaspar Hauser aux abords de Nuremberg, avec une lettre destinée au capitaine des chevau-légers. La peur de représailles le conduit à garder l'anonymat
Quant au second billet, il s'agit d'une lettre de la mère de Kaspar Hauser. Il fournit la date de naissance du jeune homme et contient une requête : « Si vous l'élevez, son père a été un chevau-léger. Quand il aura 17 ans, envoyez-le à Nuremberg au 6e régiment de Schwolische. Là aussi son père a été. »

La lettre crée un mystère immédiat autour des origines de Kaspar Hauser. Cependant le capitaine de la cavalerie remarque que  les deux billets sont écrits d'une même main. Flairant une supercherie, il enferme l'adolescent dans la prison municipale.  Le séjour de Kaspar Hauser dans la prison de Nuremberg permet au geôlier d'observer attentivement son jeune visiteur. Celui￾ci a une allure enfantine. Il n'est pas paysan : ses mains roses ne trahissent pas les labeurs du travail de la terre. Il est pauvre, maladroit et semble peu intelligent. Il sait toutefois écrire son nom. En prison, il ne mange que du pain et de l'eau et ne  démontre aucune pudeur. 
Intrigué, le bourgmestre de la ville prend en charge le jeune homme, qui peu à peu retrouve la parole et peut enfin raconter son  histoire. Il aurait passé toute sa vie emprisonné, nourri par un « homme noir » qu'il ne voyait que furtivement. Il aurait appris à  écrire son nom et à dire « Je veux être chevau-léger comme mon père » peu avant avoir été abandonné sur la route de  Nuremberg. 
Cette histoire surprenante fait rapidement le tour de la ville et fait couler beaucoup d'encre. Immédiatement, Kaspar Hauser  devient l'objet de la curiosité. Il est « l'orphelin de l'Europe ».

Le maire de Nuremberg confie alors Kaspar au docteur Daumer, un jeune universitaire. Celui-ci a pour mission d'éduquer  l'adolescent. C'est chez lui que se produira le premier incident étrange qui marque la vie publique de Kaspar. En effet, le jeune  homme est trouvé, le 17 octobre 1828, inanimé, une blessure au front. Il prétend avoir été attaqué par un « homme noir ». 
Kaspar est rapidement changé de famille. Il emménage chez un conseiller municipal, M. von Biberbach. Une enquête policière  est ouverte. Elle ne débouchera pas. Cependant, à la suite de l'attaque, les rumeurs les plus folles sur les origines de Kaspar  vont commencer à circuler à travers l'Europe entière. Le mythe de la naissance noble de l'adolescent se développe alors. On dit  que le jeune homme appartient à la Maison grand’ducale de Bade. C'est une grande ressemblance entre Kaspar et les  membres de cette famille qui a permis à des visiteurs de faire le rapprochement. Il serait le fils de la duchesse Stéphanie dont le  bébé est mort en 1812, l'année même où Kaspar aurait été recueilli par « l'homme noir ». Une histoire sordide entoure la mort  de l'héritier de la famille de Bade. En effet, l'enfant de la duchesse était l'héritier légitime du duché de Bade. Cependant, sa  disparition permettait à la comtesse de Hochberg d'accéder au trône. On prétendit que la comtesse aurait substitué au 
nouveau-né l'enfant, mort, d'une paysanne. L'héritier de la couronne aurait alors été confié à un soldat qui avait la charge de sa  captivité. 
Tout dans l'histoire de Kaspar Hauser permet de croire qu'il est l'héritier du duché de Bade. À la mort du duc Karl, en 1830, la  rumeur se fait de plus en plus insistante.  C'est un mois plus tard, le 3 avril 1830, que surgit un nouveau drame. Une fois de plus, Kaspar est attaqué, au pistolet cette  fois-ci. Les mercenaires de la comtesse de Hochberg sont-ils derrière cet attentat ? Une enquête est entamée, cependant sans  résultats probants. Les policiers émettent toutefois certaines réserves face à l'attentat. Ils le trouvent douteux et suggèrent que  l'adolescent aurait retourné l'arme vers lui. À la suite de cet événement mystérieux, le garçon change de famille pour la  troisième fois. Il se retrouve chez le baron von Tucher. 

Tout dans l'histoire de Kaspar Hauser permet de croire qu'il est l'héritier du duché de Bade. À la mort du duc Karl, en 1830, la  rumeur se fait de plus en plus insistante. 
C'est un mois plus tard, le 3 avril 1830, que surgit un nouveau drame. Une fois de plus, Kaspar est attaqué, au pistolet cette  fois-ci. Les mercenaires de la comtesse de Hochberg sont-ils derrière cet attentat? Une enquête est entamée, cependant sans  résultats probants. Les policiers émettent toutefois certaines réserves face à l'attentat. Ils le trouvent douteux et suggèrent que  l'adolescent aurait retourné l'arme vers lui. À la suite de cet événement mystérieux, le garçon change de famille pour la 
troisième fois. Il se retrouve chez le baron von Tucher. 
Kaspar y reste peu de temps. En effet, le comte Stanhorpe, voyageur anglais de passage à Nuremberg, est intrigué par  l'histoire mystérieuse du jeune garçon. Il le prend alors sous sa protection et le questionne sur ses origines. Le comte en arrive  à la conclusion que l'adolescent est hongrois et qu'il n'est pas le descendant de la maison de Bade.  Malgré tout, une enquête est alors menée, à la demande du roi de Bavière, par un magistrat, Anselm von Feuerbach. Lequel  croit à la sincérité du jeune orphelin et à l'histoire de sa captivité mystérieuse. Il corrobore donc la thèse d'une descendance  noble, prétendant que c'est par intérêt que la comtesse Hochberg a enlevé Kaspar et l'a écarté du trône de Bade. Chose  étrange : Feuerbach meurt moins d'un an après la fin de son enquête. Les plus romanesques prétendent qu’il aurait été  empoisonné parce qu'il avait trouvé une preuve démontrant de façon infaillible la théorie du complot. Les rumeurs persistent,  mais l'affaire n'est toujours pas résolue. 

Cette même année 1833, Kaspar est victime d'un troisième attentat. Alors installé dans la petite ville d'Ansbach, où il coule une  existence paisible, Kaspar, alors qu’il traverse le Hofgarten, le jardin de ville , Kaspar y est attaqué : un « homme noir » lui  plante profondément un couteau dans la poitrine et au coeur. Cette blessure est fatale. Kaspar en meurt quelques jours plus  tard. Sur son lit de mort, il murmure quelques mots qui nourrissent la mystère de son identité : « J'ai demandé pardon à tous les gens que je connais. Pourquoi ne serais-je pas tranquille ? Pourquoi aurais-je de la haine ou de la colère ? Personne ne m'a  rien fait.»


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Kaspar Hauser n’était pas seulement une énigme à son époque. Il était aussi une énigme au vingtième siècle et demeure une énigme au XXIe siècle. Avec toute l'érudition humaine qui s'est développée au fil des siècles, le mystère de Kaspar Hauser n'est officiellement toujours pas résolu. Dans ce chapitre, j'inclus ce que Rudolf Steiner aurait dit à propos de Kaspar Hauser. Cet effort est une tentative de comprendre Kaspar Hauser du point de vue de l'Anthroposophie. Ce que Rudolf Steiner a dit peut être utilisé comme référence pour des recherches ultérieures. 

Rudolf Steiner avait en effet parlé de Kaspar Hauser avec la plus grande réserve, et presque exclusivement en réponse à des demandes personnelles et lors de conversations personnelles. La réserve de Rudolf Steiner était frappante et faisait penser à König qu’elle dénotait une attitude respectueuse. protectrice face à un événement dont la profondeur et la tragédie avaient sûrement confronté l'enseignant de l'esprit. (Selg, 2012, p. 48). 
Selg (2012) rapporte que lorsque Rudolf Steiner était à Nuremberg pour une conférence en 1908, l'une des personnes à qui il a parlé était Minna Rissmann. Ses parents connaissaient Georg Friedric Daumer. Steiner lui dit que Kaspar Hauser était un « traînard de l’Atlantide » (p. 48). Chez Steiner Lors d’une conférence donnée le 17 juin 1908, également à Nuremberg, Steiner parla de « la « véracité innée » de Hauser et son extraordinaire pouvoir de mémoire avant que la pensée intellectuelle ne commence à envahir son existence » (p. 48). A Nuremberg, Rudolf Steiner n'a pas fait beaucoup plus de commentaires sur Kaspar Hauser. Il a même demandé aux gens de ne pas trop parler de ce qu'ils venaient d'entendre sur Kaspar. Hauser (p. 48). Dans La Science De L'Occulte, Rudolf Steiner (1997) a écrit que l'Atlantide était une zone qui existait à l’époque préhistorique entre l’Europe, l’Afrique et l’Amérique d’aujourd’hui (p. 240). La description « un retardataire de l’Atlantide » n’est pas facile à comprendre. Une des explications est résumé dans le commentaire de Rudolf Steiner, « la véracité innée et son extraordinaire pouvoir de mémoire avant que la pensée intellectuelle ne commençât à envahir son existence » (Selg, 2012, p. 48). Karl König le biographe et le médecin d'une communauté de Camphill en Allemagne, Hans MüllerWiedemann, ont décrit les caractéristiques de Kaspar Hauser comme suit : « Un « ancien atlante » qualité du cœur » (Rudolf Steiner) visant à contrecarrer l’apparition de l’intellectualisme et une conscience exagérée de l’identité nationale » (Müller-Wiedemann, 1992/1996, p. 214). Si l’intellect peut discerner la vérité de la non-vérité, elle peut aussi porter un jugement et prendre des décisions. les gens portent des jugements. Le cœur humain peut ne pas porter de jugement et apporter le pouvoir de l’amour quelle que soit l’origine des personnes. C'était une telle puissance d'amour et de force cardiaque que Kaspar Hauser a apporté à l'humanité. 

La comtesse Johanna Keyserlingk a écrit ce que Rudolf Steiner avait dit à Koberwitz le Pentecôte 1924 (Selg, 2012, p. 48). Koberwitz faisait alors partie de l’Allemagne. Cela fait maintenant partie de la Pologne. C'est à Koberwitz que Rudolf Steiner donna ses conférences sur le cours aux agriculteurs. du 7 au 16 juin 1924 (Steiner, 1958/2012, p. 7). Le 8 juin 1924, c'était la Pentecôte cette année-là (von Keyserlingk, 1974/2010, p. 64). Rudolf Steiner donna le Cours d'Agriculture juste avant le Cours d'éducation curative, dispensé du 25 juin au 7 juillet 1924 (Steiner, 1972/1998).
Le cours d’éducation curative a été donné à l’occasion de la Saint-Jean la même année. La Saint-Jean a lieu le 24 juin de chaque année. Koberwitz était également proche de Pilgramshain, de la Silésie, où Karl König a ensuite lancé son initiative d'éducation curative (Lindenberg, 2004, p. 48). Je vais décrire l’initiative d’éducation curative de Karl König à Pilgramshain dans le chapitre La Biographie de Karl König. Herr Winkler avait demandé à Rudolf Steiner s'il pouvait dire quelque chose sur la précédente incarnation de Kaspar Hauser. Rudolf Steiner donna la réponse le lendemain. Il avait fait des investigations spirituelles sur le lieu de naissance de Kaspar Hauser et à l’endroit où il se trouvait assassiné, mais il n’avait pu retrouver ni une incarnation antérieure ni une incarnation ultérieure. Dans ce cas, nous avons affaire ici à un être supérieur, qui avait une mission particulière sur Terre. (Keyserlingk, 1924, cité dans Tradowsky, 1980/2012, p. 280) L'anthroposophie part du principe que la vie humaine a des vies antérieures et successives sur Terre. La vie d’une personne ne se limite pas à cette seule vie mais passe par la réincarnation (Steiner, 1997, pp. 100-101). C'est pourquoi M. Winkler a demandé si Rudolf Steiner pouvait dire quelque chose sur l'incarnation précédente de Kaspar Hauser. Steiner n’a pas retrouvé l’incarnation précédente de Kaspar Hauser. Qu’est-ce que cela indiquait ? Steiner fît  une déclaration : « Dans ce cas, nous avons affaire à un être supérieur, qui avait un mission sur terre » (Keyserlingk, 1924, cité dans Tradowsky, 1980/2012, p. 280). Ne pas trouver des vies antérieures pourraient également indiquer que cet être n’avait pas fait l’expérience du terrestre. Cette vue prend en charge pourquoi Kaspar Hauser était un être si pur. Trois mois plus tard, lors d'un cours de théologie à Dornach en septembre 1924, aux prêtres de la Communauté Chrétienne, Rudolf Steiner a déclaré : « Kaspar Hauser était un être angélique » dans Tradowsky, 1980/2012, p. 282).

 Dans le christianisme ésotérique, les anges sont des êtres spirituels qui se tiennent debout et d'un rang plus élevé que les êtres humains dans les hiérarchies spirituelles (Steiner, 1960/2008, p. 33). Karl Heyer, qui était un chercheur de Kaspar Hauser, a rapporté que Rudolf Steiner avait dit : « si Kaspar Hauser n'avait pas vécu et n'était pas mort comme lui, alors le contact entre la terre et le monde le monde céleste aurait été complètement coupé » (cité dans Tradowsky, 1980/2012, p. 282). Cette déclaration importante de Rudolf Steiner ferait de Kaspar Hauser un être humain qui avait une mission spéciale sur terre. Cela signifierait que les êtres humains d'aujourd'hui peuvent se connecter avec le monde spirituel de la façon dont Kaspar Hauser a vécu et est mort. Böhmer (2019) a écrit de nouvelles informations sur cette déclaration dans son livre Kaspar Hauser : Enfant de l'Europe : une approche artistique et contemplative d'une énigme persistante. Pendant longtemps, la source de ces mots n’a pas été entièrement connue avec certitude. Nous nous n'en connaissions l'existence que grâce aux travaux de Karl Heyer. Mais il y a quelques années, la source était trouvé. La source est Ehrenfried Pfeiffer, qui a grandi à Nuremberg et a émigré au États-Unis à la fin des années 1930. (p. 77) Steiner et Pfeiffer ont discuté de ce sujet en 1924 (p. 77). C'était la même année que Rudolf Steiner a donné le cours d'éducation curative. Le 3 mars 1925, le comte Ludwig Polzer-Hoditz écrivit ce que Rudolf Steiner avait dit a dit à propos de Kaspar Hauser : Rudolf Steiner avait dit que l'individualité qui se cachait derrière le voile de Kaspar Hauser est un être qui a travaillé de manière inspirante dans la connexion rosicrucienne dès le début puis s'incarne le 29 septembre 1812 en tant que fils du grand-duc Charles de Baden et son épouse Stéphanie de Beauharnais. 

Kaspar Hauser avait une mission importante au sein du christianisme ésotérique à accomplir. (Polzer-Hoditz, 1925, cité dans Tradowsky, 1980/2012,p. 280-281) Le mot « rosicrucien » signifie « un adepte d'un mouvement des XVIIe et XVIIIe siècles professant une sagesse ésotérique et occulte avec un accent sur le mysticisme et l'illumination spirituelle » (MerriamWebster, s.d.b). Le mot pourrait également signifier « un membre de l’une des nombreuses organisations considérées comme étant descendant des Rosicruciens » (Merriam-Webster, s.d.b). Quatre semaines après ce qui précède La déclaration a eu lieu, Rudolf Steiner est décédé (Selg, 2012, p. 50). Rudolf Steiner a clairement déclaré que Kaspar Hauser était le fils du grand-duc Charles de Bade et de son épouse Stéphanie de Beauharnais. Comme le rapporte Selg (2012), « Steiner fit appel au comte Polzer-Hoditz pour étudier les intentions associé à l’individualité de Kaspar Hauser et à ses tâches historiques » (p. 50). Cette conversation a également eu lieu quatre semaines avant la mort de Steiner (p. 50). Ces conversations de Rudolf Steiner vers la fin de sa vie peuvent être considéré comme le dernier message important qu'il voulait transmettre à humanité. Karl Heyer a rapporté que Rudolf Steiner avait déclaré : « Aux côtés de Christian Rosenkreutz, Kaspar Hauser est celui qui a eu la plus grande compréhension des souffrances du Christ » (cité dans Tradowsky, 1980/2012, p. 281). 

Steiner a déclaré (2001b) que Christian Rosenkreutz a fondé le Fraternité rosicrucienne (p. 1). Christian Rosenkreutz n'était pas seulement « en possession de secrets mystérieux, mais bien plus encore, il est une clé de la compréhension chrétienne de ceux-ci, dans un contexte apocalyptique ». contexte qui indique un renouveau de l’enseignement chrétien » (p. 3-4). Kaspar Hauser a développé un lien profond avec le Christ à travers le pasteur Fuhrmann (Tradowsky, 1980/2012, p. 54). Le lien de Kaspar Hauser avec l’Être Christ avait un caractère particulièrement à voir avec le chemin de sa souffrance et de sa douleur (Selg, 2012, p. 50). 

Vivre confiné dans un cachot depuis de nombreuses années témoigne des souffrances endurées par Kaspar Hauser. Parce qu'il avait souffert, il était capable de comprendre la souffrance et d'aimer le monde aussi. En 1916, des notes prises par le comte Ludwig Polzer-Hoditz rapportaient ce que Rudolf Steiner avait a déclaré à propos de Kaspar Hauser : " L'Allemagne du Sud aurait dû devenir le nouveau Château du Graal des nouveaux Chevaliers de l'Empire. Graal et berceau des événements à venir. Le contexte spirituel avait été bien préparé par toutes ces personnalités que nous connaissons comme Goethe, Schiller, Holderlin, Herder et autres. Kaspar Hauser aurait dû rassembler autour de lui, pour ainsi dire, tout ce qui existait dans ce terrain spirituel ainsi préparé." (tel que cité dans Tradowsky, 1980/2012, pp. 277-278) 

 On rapporte également que Rudolf Steiner a déclaré que la tâche spirituelle de l'Europe centrale est vitale pour l’avenir du monde oriental et occidental : Il a suggéré d'essayer d'imaginer ce qui aurait pu et ce qui aurait dû être dans l'histoire, et a montré deux personnalités remarquables entre les mains desquelles, au moins pour un temps, des responsabilités vitales étaient tombées. Il s'agissait de Bismarck (1815-1898) et de Ferdinand von Lassalle (1825-1864), l'un des grands réformateurs sociaux de son époque, qui rencontra une la mort en duel. Rudolf Steiner a souligné que si ces deux personnalités avaient pu travaillé ensemble, comme elles étaient censés le faire, elles auraient été capables de canaliser leurs pouvoirs et potentiels vers le seul trône d'Europe centrale qui aurait pu donner le cadre nécessaire, et un cours d'histoire totalement différent aurait été possible. (Heyer, 1958, cité dans Pietzner, 1983, pp. 7-8)  Kaspar Hauser était censé être assis sur le trône, ce dont Rudolf Steiner a parlé (p. 8). Beaucoup de ces paroles laissent penser que Kaspar Hauser avait une mission particulière à remplir sur Terre. 






Nous savons à travers le Livre de l'Apocalypse (l'Apocalypse de Jean) que Jésus-Christ a fait de nous des rois. Pourtant, cette royauté ne peut être ni ordonnée ni forcée ; cela ne se fait pas non plus automatiquement. C'est seulement par le « je » ou le « moi » libre et la bonne volonté de chaque individu. L'expérimentation tragique, ces dernières années et ces derniers mois,(1) d'une brutalité accrue, d'une malhonnêteté, d'une méfiance et d'une méchanceté plus flagrantes et de la haine par la domination du moi inférieur sur le moi supérieur. Ce n’est pas encore le cas partout dans le monde, mais néanmoins dans une partie importante de l’humanité. La conséquence de cette nouvelle « chute » de l’être humain est une situation bouleversante et extrêmement inquiétante. qui s'est déroulé ces derniers jours. Dans tout cela, la manière dont cela s’est produit n’est pas primordiale, que cela se soit produit « inconsciemment » ou même délibérément. Mais cette question doit aussi être posée, malheureusement, étant donné la méchanceté qui peut entrer en action chez l'être humain. Quoi qu'il en soit, qu'est-ce que Il est important de reconnaître qu'à travers sa nouvelle chute, l'être humain fournit le facteur déterminant d' un terrain fertile pour l’efficacité du virus. Avec toute la prudence et la prévention justifiées, l'un des plus grands dangers est néanmoins de considérer une autre personne comme potentiellement menaçante pour sa sécurité. Et pas parce que l'autre personne pourrait être un malfaiteur intentionnel, mais uniquement parce qu’il respire le même air. Si cela amènerait tout tomber, le danger actuel serait fatal et ne conduirait pas au salut auquel ce La crise peut sûrement conduire, au sens du grand vers du poète Friedrich Hölderlin (1770-1843) : "Mais là où il y a un péril, la rédemption grandit aussi." La guérison, le traitement, la médecine la plus efficace est de voir l'autre non pas comme un potentiel. porteur du virus, mais comme porteur du « je », du « moi », tout comme je suis aussi vu par lui comme porteur de mon 'soi'. Il s’agit d’un motif de la Pentecôte : chaque « je » indépendant, ancré dans un « nous » indépendant, s’élève progressivement pas à pas (gradalis) vers un port toujours plus grand du Christ, vers un véritable Christophorus. C’est le chemin pour être à la hauteur de la couronne qui nous a été confiée par le Christ Jésus. L’être qui travaille et se tisse entre un « Je » et un autre est le Christ Éthérique. Kaspar Hauser fût profondément connecté au Christ sur le plan éthérique. Si l’on considère que Rudolf Steiner disait « Si Kaspar Hauser n'avait pas vécu et n'était pas mort comme lui, le lien du monde spirituel à la terre serait totalement déchiré", nous pouvons apprendre à reconnaître que son acte de sacrifice doit être considéré comme le maintien,le maintien du chemin par lequel le retour du Christ dans l'éthérique est possible. Dans son cachot, Kaspar Hauser a été volontairement privé de toute rencontre avec un autre « Je ». C'était un élément de la conception de « l’expérience », comme Rudolf Steiner se réfère au crime occulte contre Kaspar Hauser. Son isolement, couplé au fait de l'empêcher de se tenir physiquement debout, devait le placer dans un domaine intermédiaire, selon Rudolf Steiner, comme ni une entité entièrement spirituelle ni un être humain sur terre. Il s'agissait de le détourner de ses tâches et de le maintenir dans une sorte d' exil spirituel ! Et pour voir si l'expérience menée sur plusieurs années a été couronnée de succès, il fut chassé et abandonné à la Pentecôte 1828, la fête de l'individualité indépendante, comme Rudolf Steiner l'a dit. Cela révèle la transgression exemplaire contre la vie de l'âme de l'être humain, comme Anselm Ritter von Feuerbach l'appelle. Car dans sa signature, l'abandon de Kaspar Hauser à la Pentecôte nous dit qu'il faut y voir une attaque contre la fête de la Pentecôte elle-même, c'est-à-dire une attaque contre la liberté humaine elle-même ! Mais ce qui est réconfortant, c'est que Rudolf Steiner indique clairement que cette expérience n'a pas réussi ! Non seulement Kaspar Hauser est sorti indemne de son isolement, mais il en est même sorti comme dynamisé ! Or, notre isolement volontaire n’est certainement pas comparable à la vie de Kaspar Hauser dans les cachots ; et pourtant, à l'heure actuelle, il y a un grand défi pour l'être humain : celui de considérer son prochain. comme quelqu'un qui vous met en danger. Et encore : si cela devait devenir une place forte, ce serait le précurseur de la « guerre de tous contre tous » dont parlait Rudolf Steiner à propos du passage à la sixième époque de évolution de la Terre. Même si, comme il le dit, il existe déjà dans notre société des « douleurs d’accouchement » précurseurs dans ce sens.  Mais cette expérience ne réussira pas non plus. L'être humain de bonne volonté est trop avancé, et une merveilleuse humanité peut être expérimentée maintenant, comme rarement auparavant. Dans l'attaque actuelle contre le Christ dans l' éthérique, il y aura quelque chose dont on n’a pas tenu compte. Nous, les êtres humains, avons aussi progressé loin pour permettre l'attaque contre le Christ éthérique. Les gens seront capables non seulement de sortir indemnes de cette épreuve, mais, comme Kaspar Hauser, en ressortira dynamisée ! Dans cette situation, il peut être expérimenté comme un soutien, un avocat supérieur, un consolateur ! Considérons deux rythmes importants qui peuvent nous amener à comprendre la situation actuelle : L’un d’eux est la légalité de 100 ans :

En 1816, le soleil s'assombrit ; les cieux tout entiers s'assombrirent et il y eut une grande famine. C'était l'année sans été ! Cela a été provoqué par l'éruption du Mont Tambora sur l'île de Sumbawa, dans l’actuelle Indonésie, en 1815. C’était une situation catastrophique. Mais cet événement est à voir non seulement comme une catastrophe purement naturelle, mais dans sa corrélation, son interaction avec la moralité de l’être humain. Echec, particulièrement comme en témoigne la quantité incommensurable de sang qui a été versé dans le Guerres Napoléoniennes. Cet événement est conforme aux idées spirituelles que Rudolf Steiner a partagées dans sa conférence à Londres, en parlant de la « sphère noire du matérialisme » que l'être humain était tombé toujours plus profondément dans le matérialisme, après la mort, et dans le monde spirituel. Et cette « sphère noire de le matérialisme » a été assumé par le Christ éthérique, qui, au sens manichéen, « l’aimait en bonne santé ». Il c'est ainsi qu'est mort une mort « d'étouffement spirituel » – un deuxième Golgotha, mais maintenant non plus physiquement mais dans le éthérique. Et, en réalité, le soleil s’est effectivement assombri une seconde fois au cours de cette période. Et cela C'est précisément à ce moment-là, selon les recherches actuelles de Kaspar Hauser, que du monde occulte la transgression contre l'enfant d'environ quatre ans commença. Cent ans plus tard, il y avait autre chose dans l’air. En 1916, les chimistes allemands Lommel et Steinkopf a proposé l'utilisation du gaz mortel connu sous le nom de gaz moutarde comme agent de guerre. En 1918, c'était déjà largement utilisée comme arme chimique, couvrant de vastes zones. Et dans ce contexte, l'événement décisif a eu lieu dans la nuit du 13 au 14 octobre 1918, lorsqu'une attaque au gaz toxique a provoqué sur Le caporal suppléant Adolf Hitler un état d'affaiblissement décisif, ce qui a conduit, dans les semaines qui ont suivi, à l’influence percutante d’un être hiérarchique élevé, bien que déchu et arriéré. Nous savons ce qui a suivi. Ce qui est important, c'est la conscience que l'être humain est responsable d'un être. cela fonctionne à travers lui. Ce qui s’est ensuite déroulé historiquement n’est pas de dimension humaine. Aujourd’hui, plus de 100 ans se sont écoulés et, une fois de plus, quelque chose se prépare. Est-ce une « catastrophe naturelle » ? Est s’agit-il en effet peut-être d’armes biologiques, comme beaucoup en discutent ? Quoi qu'il en soit, comme déjà mentionné, ce qui compte c'est de se reconnaître et de se reconnaître : la cause du péril actuel, c'est l'humain. étant lui-même, qui est tombé plus loin dans les profondeurs. Si nous reconnaissons les liens, nous pouvons contrôler la situation, tout comme Michael tient le dragon en place. Un autre rythme important pour reconnaître l'époque dans laquelle nous nous trouvons est la légalité astrologique du nœud lunaire. Non seulement ce rythme de 18 ans, sept mois et neuf jours revêt une grande importance dans notre sa propre biographie, mais aussi en ce qui concerne les événements décisifs de l'histoire de l'humanité. Le nœud lunaire souvent coïncide avec une crise ; mais c'est une crise qui est pour le bien de l'être humain, pour qu'on se rapproche à la tâche réelle de son incarnation.

Si l’on compte 18 ans, sept mois et neuf jours en arrière, nous arrivons étonnamment près de l’événement que nous avons vécu : le 11 septembre . Dès le début, un sceau a été marqué sur le nouveau millénaire, ce qui a conduit à une restriction significative de la liberté humaine. Et c'est précisément ce qui est encore dans l'air : un une énorme restriction de la liberté de l’être humain, telle qu’on la croirait difficilement possible. Et maintenant plus qu’à l’époque. Cette relation du nœud lunaire relie les deux événements chacun ; ils doivent être rassemblés dans notre réflexion, aussi complexe et difficile que cela puisse être. « Comment ça se passe avec ta couronne, être humain ? » C'est la question que nous devons nous poser nous-mêmes. Et ce que nous pouvons gagner en le faisant est énorme. La Lémurie a pris fin par le feu ; la vieille Atlantide par l'eau. Que fait l'air, que fait l'éthérique maintenant souhaitez-vous nous en faire part ? À partir de la cinquième période atlantéenne, Manu entreprit de guider l'être humain au-delà de la fin des temps. De la quatrième époque de l'évolution terrestre (Atlantide) dans la première époque culturelle de la cinquième époque terrestre évolution (post-atlantéenne), époque indienne ancienne. Nous nous trouvons à nouveau dans une cinquième époque culturelle, mais maintenant dans l'ère post-atlantéenne. Les impulsions décisives – comme Rudolf Steiner le dit très clairement : atteindre la sixième époque de l'évolution terrestre (l'Âge des Sceaux) proviennent de la sixième époque culturelle post-atlantéenne. Mais pour que la sixième époque culturelle post-atlantéenne puisse prendre les impulsions nécessaires, la préparation requise est nécessaire à notre cinquième époque culturelle. Cela signifie que pour que l'humain être capable de continuer à s'élever – au-delà de l'âme consciente jusqu'au moi spirituel, l'esprit de vie, jusqu'à homme spirituel – nous devons déjà préparer la prochaine époque culturelle. Et c'est celle qui est nommée dans le Livre de l'Apocalypse : l'Eglise de Philadelphie.

Comment Kaspar Hauser a-t-il pu sortir de l’adversité dans un état de dynamisme ? Je voudrais citer deux qualités : D'une part, en agissant par pur amour, en offrant son cheval de bois un peu de son eau avant d'en boire lui-même, en donnant du pain à son cheval de bois avant qu'il en mange lui-même! C’est là que vit, tisse et travaille le Christ ! Et d'autre part, en étant réceptif à l'aide d'en haut : la Parole de Dieu. Car nous le savons : l’être humain ne vit pas de pain seul, mais par chaque parole qui sort de la bouche de Dieu. Mais comme Kaspar Hauser vivait de pain seul, il est évident qu'il ne vivait pas seulement de pain, mais de toute parole qui sortait de sa bouche. de Dieu! Accueillons la Parole divine et accordons notre amour à ceux qui nous sont proches, même si l'un d'eux est un cheval en bois! Alors oui, nous en ressortirons grandis et serons capables de guider l’humanité vers l'Âge des Sceaux. Kaspar Hauser peut être pour nous une ÉTOILE GUIDANTE sur ce chemin !


(1) écrit pendant le COVID

https://www.karlkoeniginstitute.org/images/subjectarea_documents/Kaspar_Hause_the_Current_Attack_on_Christ.pdf


Lire aussi le précédent article : 

lundi 18 décembre 2023

L' approche anthroposophique de la réincarnation et le problème de la huitième sphère

 


LA RÉINCARNATION PAR HARTMANN

Franz Hartmann (1838-1912) était un ésotériste allemand, un astrologue, un théosophe et un membre de la franc-maçonnerie égyptienne. Il était en relation étroite avec Rudolf Steiner, à propos de lui, c'est comme ça qu'il s'exprime dans O.O.n. 93 :
« Cet Ordre de Misraïm est aujourd'hui en Allemagne dirigé par un certain Reuss. Même le célèbre Carl Kellner travaille dans cette direction. La véritable œuvre littéraire est entre les mains du Dr Franz Hartmann, qui avec sa plume sert ce rite Misraim au plus haut niveau".

Hartmann a écrit une biographie de Paracelse et de Jacob Böhme, tous deux très appréciés par Rudolf Steiner et a traduit la Bhagavad-gîta en allemand. C'est sur cette traduction que Steiner s'est basé dans sa série de conférences intitulée "La Bhagavad-gita et les lettres de Paul". Le poème suivant d'Hartmann sur la réincarnation devrait être lu et médité avec la plus grande attention afin d'éviter les fantasmes inutiles et les suggestions dangereuses qui semblent extrêmement fréquentes aujourd'hui.

« La meilleure façon de se convaincre de la vérité de la doctrine de la réincarnation serait de se souvenir des existences antérieures. Vous entendez souvent la question : « Si j'étais sur cette terre plusieurs fois, pourquoi ne puis-je pas me souvenir de ces formes d'existence antérieures ? (...) La personnalité de l'homme à chaque naissance est une fois nouvelle et qui n'a jamais été vécue auparavant, le cerveau ne peut stocker en mémoire que les impressions qu'il a reçues une fois. Le « père céleste » est le créateur, la personnalité est le fils. Le fils n'existait pas avant que le père ne lui donne naissance ; mais quand le fils ne fait qu'un avec le père, alors il peut aussi savoir quels sont les enfants qu'il a mis au monde.

La mémoire complète des expériences terrestres passées n'est donc que la faculté de ceux qui sont déjà arrivés à la connaissance intime de leur origine, c'est-à-dire ces saints hommes qui ont atteint cette condition que les chrétiens mystiques appellent communion avec Dieu et les Indiens « Yogis ». À l'homme ordinaire peut parfois murmurer comme dans un rêve quelques images d'incarnations précédentes, comme des flashs de lumière d'un monde spirituel supérieur qui l'entoure ; mais beaucoup de ces rêves de l'esprit ne sont qu'un jeu de fantaisie. Un homme peut tout imaginer, mais il ne peut pas vraiment être reconnu comme un être divin, sauf celui qui est déjà devenu à l'image de Dieu.
Il est aisément compréhensible, que la foi en la réincarnation est liée à inculquer à l'homme une conception de l'univers assez différente de celle qui est communément répandue ici et à la nobiliser ; parce que cette doctrine nous montre que dans la vie actuelle nous sommes devenus ce dont nous nous sommes rendus dignes dans l'existence antérieure, et que dans l'existence nous récolterons ce que nous sèmes maintenant. L'homme a son propre destin entre ses mains ; chacun est le créateur de sa chance et de son malheur. Ce qui leur arrive n'est jamais sans raison, mais cela vient des lois de l'ordre et de l'harmonie qui gouvernent le monde entier. "




Franz Hartmann



«Tant que vous n’avez pas conscience de la loi continue de la mort et de la renaissance, vous n’êtes qu’un vague invité sur une terre obscure» GŒTHE

«Le génie, c'est l'expérience. Certains semblent croire que c'est un don ou un talent, mais c'est le fruit de la longue expérience de plusieurs vies. Certaines âmes sont plus vieilles que d'autres, et elles en savent plus long». Henry Ford (industriel américain (1863-1947).

tiré du blog http://8esphere.blogspot.com/2007/09/typical-approach-to-demonic-possession.html

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Quand il fut demandé à Rudolf Steiner de décrire sa mission en tant que maître spirituel, il dit qu’elle consiste à réintroduire la réincarnation et le karma dans le christianisme. Cela donne une bonne idée de la place que tiennent le karma et la réincarnation dans son œuvre, une œuvre non seulement très vaste mais aussi très profonde quoique difficile d’accès à prime abord.

Cet essai vise à donner un aperçu le plus cohérent possible de la vision qu’avait Rudolf Steiner de la réincarnation. Or il serait insuffisant de s’en tenir à cela ; il faut le connaître, retracer ses influences et ses positions philosophiques et occultistes, en décrivant sa vision de l’être humain et du cosmos, etc.

La cosmosophie et l’anthroposophie steinerienne

Steiner se distancie des « spiritualistes », or il considère néanmoins que tout le matériel est une manifestation visible du spirituel qui lui est antérieur. Le but de toute la création serait le développement du moi humain. La vision anthroposophique du cosmos est donc non seulement christocentrique mais aussi anthropocentrique. Steiner conçoit que la Terre elle-même se réincarne sept fois selon un plan précis (Steiner, 1910). L'humain était présent depuis le commencement avant même la création du minéral, mais peu conscient de lui-même. Le corps physique a commencé son développement dans la première incarnation de la Terre, nommée Ancien Saturne (rien à voir avec la planète), un corps céleste fait de pure chaleur. Le corps éthérique (forces formatrices), que nous partageons avec les végétaux, tire son origine de l’incarnation suivante, aérienne et gazeuse : l'Ancien Soleil. Le corps astral, l’âme animée faite d'émotions, de sensibilité et de rêve, que nous partageons avec les animaux, s'est développé sur l'Ancienne Lune, l'état fluidique qui constitue le troisième stade, immédiatement antérieur à la Terre minérale actuelle. Au cours de l’Ancienne Lune certains êtres spirituels, ou hiérarchies célestes, sont entrés en opposition avec les hiérarchies progressives ; ainsi de nombreux anges déchus ont joint les rangs de Lucifer dans sa révolte. Les Archées, les Archanges et les Anges ont vécu leur stade humain respectivement dans l’Ancien Saturne, l’Ancien Soleil et l’Ancienne Lune. L’espace-temps réservé à notre développement est la Terre (Steiner, 1910).

L’homme est descendu graduellement suivant une pente descendante afin d’acquérir le moi dans la matière minérale. C'est seulement dans la Terre minéralisée, la quatrième incarnation de la terre, au plus bas de la descente dans la matière, que l'humain a pu développer un moi conscient d'être séparé des autres. Avant de pouvoir enfin s’incarner dans des grands singes assez évolués et ainsi pouvoir s’approprier un corps physique adéquat, l’humain archétypal a dû attendre que des parties de lui-même se détachent et se sacrifient en se faisant animaux. L’humain archétypal, au commencement, ne faisait qu’un avec le règne animal (Steiner, 1910). Sans ce sacrifice de la part des animaux, l’humain n’aurait pu être ce qu’il est aujourd’hui car il doit se nourrir des règnes inférieurs. Or il n’y a pas que les animaux qui ont accepté de se sacrifier, il y a aussi des êtres spirituels qui sont restés en retard dans l’évolution et constituent aujourd’hui des forces perturbatrices dans l'évolution humaine. Ce sont ces êtres spirituels retardés, lucifériens, qui ont causé la chute de l’homme. Par conséquent, l'homme acquit la conscience du moi plus tôt que prévu et s’emplit par trop de matière minérale, de « poussière ». L'homme se trouve depuis confronté aux forces du mal et son incarnation constitue l’arène d’un combat entre les forces progressives et retardataires et dont l’enjeu est la liberté humaine. Une fois le moi acquis et la liberté qui y est liée, l’homme a acquis la possibilité de faire le mal. Pour sauver l’humain de la déchéance rendue possible par la liberté individuelle, le Christ s’est sacrifié en s’incarnant dans la chair afin de pouvoir se manifester humainement et montrer aux hommes la voie de l’Ascension. Sans l’incarnation du Christ, et si l’humain ne suivait pas son exemple, la création irait à sa perte à cause des lois entropiques de la Nécessité. Le Christ est venu porter les forces nécessaires à la résurrection des corps. Sans son incarnation et son union avec le devenir humain et terrestre, le monde entier serait incapable de retourner au spirituel ni même de continuer à exister. Jésus-Christ a révélé une imagination du Graal aux apôtres, signifiant que l’homme doit devenir un Graal en portant le sang du Christ (ou son Ego), c’est-à-dire en transformant ses corps inférieurs (corps physique éthérique et astral) en corps supérieurs spiritualisés, et faire de même avec la Terre (elle aussi dotée d’un corps physique éthérique et astral, ce dernier étant fait des esprits de la Nature) en s’unissant à elle. La tâche de l’homme est donc de s’unir à la matière et aux règnes inférieurs qui constituent ses propres corps inférieurs de même que ceux de la Terre, afin de les spiritualiser. Les réincarnations visent justement à spiritualiser cette matière, comme l’a fait le Christ lorsqu’il s’est incarné et s’est uni à la Terre lors de la Crucifixion sur le Golgotha. Les réincarnations ont débuté avec la Chute de l’homme et auront donc une fin - lors de la résurrection des corps. Au terme des réincarnations, il n’y a pas fusion avec Dieu mais bien communauté d’individus indépendants unis dans leur projet de former ensemble la communauté humaine au sens le plus élevé. Dans la future incarnation de la Terre, appelée Jupiter ou la « Nouvelle Jérusalem », l’homme accédera au statut d’Ange et devra s’occuper des petits êtres de la Nature devenu grands, rendus à l’état humain. C’est donc dire que nos Anges gardiens individuels furent autrefois humains et qu’avant d’être humains, nous étions des petits êtres de la Nature (élémentaux), comme Arielle la petite sirène qui voulait devenir humaine (De Jong, 2000). Puis viendra la sixième réincarnation de la Terre : le stade de Vénus. C’est dans cette incarnation de la Terre que sonnera le Jugement Dernier, le moment crucial de la fermeture de l'Abîme de la Bête, marqué par le 666. L’homme est indéfiniment perfectible et devient ce qu’il pense de lui-même ; ainsi ce qui est présentement intérieur sera révélé extérieurement par « la marque de Dieu sur le front » (Steiner, 1908). C’est alors que se produira la grande analyse, la grande décantation, la grande division entre l’humain vraiment humain et l’homme retardé, demeuré animal, mû par un égoïsme unilatéral, dont la destination ultime est l’Abîme, l’enfer. L’esprit humain qui y est condamné disparaît à jamais et retourne à la soupe primordiale. Parce que Dieu respecte la liberté, il ne peut pas « sauver » de l’extérieur quelqu’un qui s’est fermement ancré dans le mal. Enfin, dans le septième et dernier stade de Vulcain, l'homme sera devenu un dieu créateur et deviendra, à la suite des neuf hiérarchies angéliques traditionnelles (voir Denys l'Aréopagite), la dixième hiérarchie céleste, celle de la Liberté et de l'Amour. Comme le fils est lui-même appelé à devenir père, le rêve prométhéen de la divinisation de l’homme se réalisera et il sera en mesure de diriger une nouvelle création.

Les religions de libération et les religions de résurrection

Les religions hindoues et bouddhistes et autres religions préchrétiennes sont des religions de libération, affirme Steiner : l’humain voulait retourner à l’esprit et fuyait l’incarnation, la matière et la terre (Archiati, 1996). Dans le monde hébreu, puis chrétien, a germé une religion de résurrection, qui vise à unir l’homme avec la terre et la matière et à les transformer par amour. La résurrection n’est pas la libération : ce n’est pas l’âme qui fuit la matière vers l’esprit mais bien l’esprit qui s’unit parfaitement à la matière. L’homme est présentement trop faible pour rester uni à la terre et à la matière. Le Christ est tellement plein d’amour qu’Il s’est uni avec la terre et le devenir humain. Il est tellement sans résistance qu’Il n’a pas besoin de se désincarner (Archiati, 1996). Parce que nous endommageons nos corps physique, éthérique et astral, nous devons quitter le corps périodiquement. Or les dommages faits au corps astral ne peuvent trouver leur expression (sous forme de retour karmique) en une seule vie parce que le corps est devenu, au fil des millénaires, imperméable à l’esprit (Archiati, 1996). Il faut donc se réincarner pour récolter les fruits de ses actes, pensées, paroles, bref de tout ce qui découle de notre libre choix. Ultimement, nous ferons comme le Christ et nous nous unirons avec la Terre dans l’amour. Puis l’amour rendra la poussière minérale au cosmos car l’amour dissous (Archiati, 1996). Il restera un corps humain-terrestre parfaitement spiritualisé, dépourvu de poussière minérale.

Des théosophistes accusèrent Steiner de donner préséance à la religion chrétienne, or pour lui le Christ transcende les religions et n'est aucunement limité par les dénominations chrétiennes. Le Christ se serait manifesté avant le christianisme dans Vishvakarman (ancienne Inde), Ahura-Mazda (ancienne Perse), Osiris (ancienne Égypte) et dans Odin dans les mythes nordiques avant de s'incarner dans un corps physique en Palestine et de révéler son imagination du Graal pour le futur : la transformation-résurrection de l’humanité et de la Terre (Archiati, 1996). Les anciennes religions à mystères devaient servir à préparer la voie à la venue du Christ et jouent un rôle de Précurseur. La Gnose issue des anciens mystères est une voie dépassé qui selon Steiner appartiendrait à l'époque égypto-chaldéenne, soit du quatrième millénaire à l’an 747 avant notre ère (Steiner, 1910). La voie d’initiation moderne n’est plus une gnose ancienne reçue passivement lors d’une initiation de trois jours. Le christianisme a transformé de fond en comble les anciens mystères et les a rendus publics en les révélant dans les sept stations de la Passion du Christ. Les premiers chrétiens gnostiques ont compris le mystère du Christ à travers le prisme de la philosophie grecque et de la sagesse des mystères d’Orient, que Steiner appelle "luciférienne", c'est-à-dire découlant des révélations anciennes de Lucifer, qui se serait incarné en 3000 avant notre ère (Steiner, 1910). Son dualisme esprit-corps et son attitude de fuite devant le monde illustrent son côté « luciférien ». La voie d'initiation moderne, rosicrucienne, renouvelle le courant du Graal, lequel a renouvelé le christianisme manichéen et gnostique (Steiner, 1910).

L’organisation de l’être humain

Au stade d'évolution où il se trouve, l'homme peut être divisé en neuf, sept, quatre ou trois parties. En neuf : physique, éthérique, astral, âme de sensibilité, âme d'intelligibilité, âme de conscience, Esprit-Soi (manas), Esprit-Vie (buddhi), Homme-Esprit (atma) ; en sept : physique, éthérique, astral, Ego (Moi), Esprit-Soi (manas), Esprit-Vie (buddhi), Homme-Esprit (atma) ; en quatre, puisque les corps supérieurs ne sont pas encore réalisés : physique, éthérique, astral, Ego (Moi) ; et finalement en trois : corps, âme et esprit. Les corps supérieurs – l’esprit - seront actualisés dans le futur. Un yogi et un rosicrucien, de par leurs exercices, atteignent plus rapidement des niveaux que les humains n’atteindront que dans le futur. Les corps spirituels résultent de la transformation des corps inférieurs, par un travail spirituel conscient du moi dans l’âme sur les corps inférieurs, ce qui les élève à l’état de corps spirituels. L'âme est l'intermédiaire entre le corps matériel et l'esprit issu des mondes supérieurs divins. Le corps est soumis à l'hérédité, l'âme gère le karma – la rétroaction différée des actes causant la transformation de l’actant - et l'esprit passe par de multiples réincarnations (Tummer, 2000).

Le devenir de l’homme après la mort

Au cours du sommeil, le corps physique reste imprégné de l’éthérique (qui le maintient en vie), mais l’astral (l’âme) et le moi (ego) le quittent pour leur propre monde, dans l’invisible. Au moment de la mort, par contre, le corps éthérique, le corps astral et le moi quittent définitivement du corps (Steiner, 1910). Le moi, qui reste enrobé de l’astral et de l’éthérique, verra sa substance éthérique se dissoudre en trois jours environ, après avoir assisté au spectacle de sa vie entière à l’état de veille (Steiner, 1910). Une fois le corps éthérique dissous, l’individu entre dans le monde de l’âme (Steiner, 1910). En s’élevant vers les mondes supérieurs, il traversera une par une les sept sphères planétaires, dans l’ordre : la Lune, Mercure, Vénus, le Soleil, Mars, Jupiter et Saturne (Steiner, 1912). À ne pas confondre avec les incarnations planétaires décrites plus haut. L’esprit et son âme entrent d’abord dans le kamaloca (« lieu du désir »), le monde lunaire, où il se départissent des désirs brûlants, qui le tourmentent tels des ombres démoniaques mais qu’il ne peut plus assouvir puisqu’il n’a plus de corps physique (Steiner, 1910). L’individu revit ainsi une seconde fois toute ses nuits de sommeil, soit un tiers de la durée totale de sa vie (Steiner, 1910). Il retrouve seulement ses proches qui sont décédés avant lui, puis ceux qui sont morts après lui. Ceux-ci lui renvoient les impressions – positives et négatives, objectives et subjectives - qu’il leur a laissées de son vivant (Steiner, 1912). Il ne peut que contempler le spectacle de ses actions – tel que le conçoit Aristote -, impuissant parce qu’il ne peut plus rien y changer, ce qui l’attriste au plus haut point. L’individu revit tout ce qu’il a infligé à autrui mais de son point de vue : s’il a pris plaisir à faire souffrir un autre, il revit cette souffrance de façon décuplée. Cela n’a rien à voir avec le karma comme tel ; c’est plutôt une sorte de purgatoire (Steiner, 1910). Si l’individu n’était pas très conscient du spirituel et que ses proches ne l’étaient pas non plus, il ne peut plus sentir leur présence de l’autre côté de la mort et se sent très seul. Steiner incite ses lecteurs à se faire des imaginations de leurs défunts afin que ceux-ci puissent communiquer avec eux, ce qui toutefois ne correspond pas au spiritisme ni au médiumnisme, que Steiner condamnait (Steiner, 1912). Les éléments de l’âme (astral) sont laissés derrière dans la sphère de la lune (kamaloca) et l’esprit poursuit sa route vers les mondes spirituels proprement dits. Dans la sphère immédiatement supérieure, celle de Mercure, la force ou la faiblesse morale de l’individu se manifeste (Steiner, 1912). Un individu immoral deviendra un ermite solitaire dans les mondes spirituels. Plus l’individu a été moral, plus il est entouré et en bonne compagnie (Steiner, 1912). Toute douleur morale et spirituelle est guérie au niveau de la sphère de Mercure car tout cela ne peut entrer au Ciel. Ensuite, dans la sphère de Vénus se reflètent les impulsions religieuses et artistiques de l’individu (Steiner, 1912). Il y retrouve ceux qui partageaient ses croyances religieuses comme une communauté de croyants. Un incroyant se trouve encore plus seul, mais un incroyant épris d’art peut compenser son manque de sentiment religieux par le sentiment artistique.

Dans la sphère suivante, la sphère Solaire, n’entre que ce qui est apte à entrer dans l’universel. Le passage de la sphère de la Lune à la sphère du Soleil correspond au passage de la subjectivité de l’âme à l’objectivité du spirituel (Archiati, 1996). Avant le mystère du Golgotha, le Christ était dans la sphère Solaire, mais depuis qu’il s’est uni avec la terre, il ne s’y trouve plus. On n’y retrouve que son reflet. L’individu court ici le risque de confondre Lucifer avec le Christ, puisque les deux se ressemblent et, selon Steiner, disent les mêmes paroles : « vous êtres des dieux » (Steiner, 1912 : 101, 139). Le sort de l’individu au-delà de cette sphère dépend de la compréhension de la part de l’individu de l’universalité des religions et de leur relation avec le mystère du Golgotha – l’union du Christ avec la Terre (Steiner, 1912). C’est d’ailleurs au niveau du Soleil que les transformations majeures de l'individu ont court : la pensée se traduira dans la vie future par la démarche physique et les membres, et inversement, l’état physique des membres se traduira par sa façon de penser (Diet, 2002). Il est donc impossible que l’individu conserve une ressemblance corporelle et psychique d’une vie à l’autre puisque les deux s’inversent : sa pensée formera ses membres et l’action des membres formera sa nouvelle façon de penser.

Dans la sphère de Mars, l’individu quitte définitivement le microcosme pour entrer dans le macrocosme. Il commence à communier avec les êtres des hiérarchies célestes, mais vaguement, puisqu’il ne peut qu’entendre leur « parole » et voir leurs manifestations (Archiati, 1996). Ensuite, au niveau de Jupiter, il comprend la pensée - le Logos – des êtres spirituels qui l’entourent (Archiati, 1996). Enfin, au niveau de Saturne, l’individu est en communion avec les êtres célestes (Archiati, 1996). Là il tourne son regard vers le Zodiaque, au-delà des sphères planétaires, où il peut discerner une figure sublime de Lumière, la lumière du Christ. C’est le « Minuit de l’Existence », la rencontre de l’ego avec le Christ (Prokofieff, 1995). Devant ce spectacle grandiose l’être humain se sent tellement petit et imparfait que naît en lui le désir irrésistible de redescendre sur Terre, puisque ce n’est pas en communion avec les êtres spirituels qu’il peut développer, par exemple, la charité et l’altruisme, mais seulement dans la rude expérience de l’incarnation sur terre, avec tout son lot d’égoïsme et auprès d’autres individus humains. Le moment de la redescente vers une future incarnation correspond à un obscurcissement progressif de la conscience. L’individu perd conscience de sa communion indifférenciée avec les êtres spirituels et ne peut comprendre que leurs manifestations (Archiati, 1996). Peu à peu, l’individu porte un intérêt grandissant pour le devenir historique de l’humanité. Il commence à choisir un couple – le choix est une notion platonicienne importante reprise par Steiner -, dans une nation, une ethnie, une communauté, une famille précise. Trente-six degrés de générations avant la naissance séparent le moment du choix et le moment de l’incarnation, soit près de 1200 ans ! (Archiati, 1996). Un être humain dit « normal » se réincarne deux fois, une fois en homme une fois en femme, à l’intérieur d’une période culturelle de 2160 ans (le soleil prend 2160 ans à parcourir un signe zodiacal de l’année solaire platonicienne de 25 920 ans) donc une fois aux mille ans. Il est possible qu’un individu s’incarne deux ou trois fois de suite dans le même sexe mais pas plus.

L’être humain étant très diversifié, la durée-type d’une incarnation à tous les 1080 ans varie beaucoup. Elle peut même se réduire à 500 ans ou presque, surtout aujourd’hui, en période de matérialisme épidémique (Steiner, 1912). Les individus matérialistes, attachés à leur animalité et à l’intellectualité, peinent à évoluer dans les mondes supérieurs et reviennent trop rapidement vers leur prochaine incarnation. Steiner (1912 : 191-192) en donne des descriptions à donner froid dans le dos : les immoraux et les paresseux, une fois décédés, sont incapables de s’orienter eux-mêmes dans les mondes supérieurs et deviennent la proie d'Ahriman, qui les utilise comme esprits élémentaux ahrimaniens, comme forces de destructions, notamment sous la forme de maladies endémiques (bacille, peste, virus) ou d’obsessions poussant des vivants particulièrement immoraux vers le meurtre d’enfants ou de jeunes adultes. Toutefois, les forces de croissance de la jeune personne, qui n’ont pu s’épuiser en raison de son décès précoce, deviennent des puissances spirituelles positives, compensant ainsi l’accroissement du nombre de défunts qui deviennent les instruments d’Ahriman (Steiner, 1912 : 193).

Peu de temps avant la renaissance, l’individu voit le précieux germe de son corps physique lui glisser entre les doigts et filer vers le ventre de la future mère. Profondément attristé, il s’enrobe de substance éthérique prise à même la substance éthérique du cosmos. Il vit dès lors dans l’éthérique et y retrouve le Christ et, à son service, Michaël, qui lui montrent le karma de sa vie (Steiner, 1912). Le choc peut parfois être si grand que l’individu ne s’en remettra pas et passera sa vie à nier son destin et à se fuir soi-même. Après la troisième semaine de développement fœtal, le Moi entre dans le processus de formation du corps, lui imprègne sa forme et commence à s’y incarner (Archiati, 1996). En fait, le Moi ne sera complètement incarné dans le corps que vers la vingtaine. Steiner voit dans les mouvements saccadés et brusques de l’enfant, un indice de l’incarnation incomplète du Moi dans le poupon.

Les étapes de redescente vers l’incarnation sont récapitulées après la naissance : le nouveau né vit d’abord en communion indifférenciée avec son environnement et son entourage. Il commence à marcher à s’orienter dans une direction précise, tout comme dans la communion, qui constitue « la forme suprême d’orientation et d’engagement sur une voie » (Archiati, 1996). Ensuite, le poupon écoute les paroles - logos - de ses parents, mais sans comprendre. Il devient ensuite capable de comprendre et de parler, puis, lors de la chute des dents, un changement majeur se produit dans l’enfant : l’énergie de volonté, qui était monopolisée par le développement physique, est tout d’un coup libérée et peut se transformer en force d’imagination, libérant les énergies nécessaires au développement de la pensée (Archiati, 1996). Le stade d’union avec l’éthérique est ainsi répété, car selon Archiati (1996) et Steiner (1910), la pensée est en rapport avec l’éthérique par sa la capacité de pénétrer et de comprendre les forces cosmiques, l’éthérique.

Manifestations du karma

Steiner a tenté de décrire les processus spirituels qui gouvernent le cycle de la vie et de la mort. Il reste encore à expliquer les rapports qui lient une vie à une autre, individuellement. Au cours de plusieurs vies, disons trois vies d’affilée (a-b-c), une attitude de haine (a) nous revient en souffrance (b) et cette souffrance nous rend stupide et apathique (c) (Steiner, 1912). Au contraire, une attitude d’amour (a) rend plus profondément joyeux (b) et plus apte à comprendre et à connaître le monde (c) (Steiner, 1912). Une attitude à mi-chemin entre amour et haine serait une attitude neutre de devoir (a), laquelle nous revient en indifférence (b), puis se transforme en une vie dépourvue d’orientation, à la dérive (c) (Steiner, 1912). La situation est plus complexe dans le cas de l’envie, une maladie typiquement luciférienne qui concerne le désir et qui constitue une négation de l’individualité d’autrui, une incapacité à se réjouir de son bonheur (Archiati, 1996). L’envie (a) nous rendra plus critique (b) et cette attitude critiqueuse nous revient en insécurité et en dépendance (c), laquelle se manifestera par une faiblesse corporelle (d) (Steiner, 1912). On peut le guérir dans l’enfance en lui pardonnant son erreur, son envie (Archiati, 1996). Le mensonge est une maladie typiquement ahrimanienne qui concerne la vérité objective en ce qu’il consiste à nier l’universel, ce qu’on a tous en commun, le sens du vrai (Archiati, 1996). Le mensonge (a) devient de la légèreté morale et de la frivolité (b), rend le regard fuyant, incapable de faire face au regard d’autrui (c), et tout cela risque de générer des déficiences mentales (d) (Steiner, 1912). On peut corriger partiellement ces traits dans l’enfance en lui lisant des contes, empreints de vérités simples et universelles – justement ce qui avait été nié (Archiati, 1996).

Les maladies ont généralement des causes lucifériennes ou ahrimaniennes (sataniques). Lucifer est le séducteur qui nourrit l’égoïsme, l’ambition, l’infatuation du moi et la dévaluation du corps. Le mysticisme flou, la ferveur religieuse, les rêveurs décrochés, les extatiques et la Théosophie sont lucifériens. À l’inverse, Ahriman est le parfait scientiste matérialiste qui ramène tout au corps ou à des processus matériels et nie la réalité de l’esprit. Il rend l’individu non pas égoïste mais destructeur, intellectualiste abstrait, froid et analytique, calculateur, sans vie, étroit d’esprit, stéréotypé, sec et crispé. Les maladies d’origine lucifériennes sont le fruit du chaos dissipatif des passions : fièvre, instabilité émotionnelle, folie, ivresse, hallucinations, désintégration de l’individu (Schütze, 1978). Les maladies ahrimaniennes sont de même nature que la mort : paralysie, durcissement des artères et des articulations, ossification, calcification, crampes, inflexibilité, lourdeur, insensibilité, sclérose, rhumatismes, etc. (Schütze, 1978) Le mal n’est donc pas simplement l’opposé du bien : le mal est aux extrêmes et le bien et la santé sont le produit d’un équilibre dynamique entre deux excès. Il est ainsi possible de rétablir la santé de l’organisme, de l’âme et de l’esprit en contrebalançant un excès luciférien expansif par son antithèse ahrimanienne contractive et vice versa.


Les ressemblances psychophysiques, les liens de sang et les affinités électives

On sait que dans l’intervalle entre deux vies, au niveau de la sphère Solaire, la pensée et les membres s’inversent : la pensée – intérieure - devient le futur physique – extérieur – et vice versa : l’action extérieure des membres du corps se manifestera dans la façon de penser. De la même façon, Steiner explique que les ressemblances psychophysiques des individus d’une même famille proche, que la science actuelle attribue à l’hérédité, seraient en fait les signes extérieurs que l’esprit même de ces individus se ressemble (Archiati, 1996). C’est d’abord parce qu’ils s’aiment et se ressemblent en esprit qu’ils se sont incarnés dans la même famille et, par conséquent, qu’ils se ressemblent physiquement. Steiner affirme de plus que, d’une vie à l’autre, les liens héréditaires, les liens de sang, alternent avec les liens d’affinités (Archiati, 1996). Par exemple, les individus avec lesquels j’ai développé des liens d’affinité et d’amitié, sur une base libre, je les retrouverai parmi les membres de ma famille dans ma prochaine vie. Et inversement, les membres de ma famille actuelle, en plus d’avoir été mes affins dans ma vie antérieure, seront mes affins dans ma prochaine vie. Puisque ceux qui développent des liens d’affinité en viennent à se ressembler au niveau psychique et que, dans l’intervalle entre deux vies, l’extérieur et l’intérieur s’inversent, par conséquent, dans leur prochaine vie, ils se ressembleront physiquement, d’autant plus qu’ils seront unis par le sang. Puis, lorsque les membres de cette même famille se retrouvent enfin dans l’intervalle spirituel entre deux vies, ils développent le désir de nouer, dans leur prochaine vie, des liens libres, fondés sur les affinités (Archiati, 1996). Ils prévoient ensemble qu’ils se retrouveront entre vingt et quarante ans sur la base de leur liberté - fondée sur le karma, certes, mais libérée des liens de sang (Archiati, 1996). On peut changer la qualité de nos relations avec nos consanguins, mais le lien de sang lui-même ne peut être changé ; dans le cas des liens d’affinités, on est complètement libre de nouer et de dénouer des relations sociales selon notre désir. C’est certain qu’en vertu du karma on attire à soi ce que l’on est, qu’on le veuille ou non, mais plus on en est conscient, moins on est soumis au déterminisme des liens karmiques. Steiner souligne aussi qu’à peu d’exception près, les mêmes individus se réincarnent en groupe et rencontreront au cours de leur vie seulement les individus avec lesquels il est karmiquement lié (Archiati, 1996). Il sera donc à jamais impossible de se réincarner en même temps que notre arrière arrière grand-père car celui-ci est décédé avant notre naissance. Lui se réincarne en même temps qu’un groupe karmique particulier et différent du nôtre, qui inclut seulement les individus auxquels il est karmiquement lié.


Modalités du karma

Le karma selon Steiner n’est pas qu’une loi de cause à effet, c’est le fait que toutes mes actions, paroles et pensées vont revenir à moi et me transformer radicalement, inévitablement. Et ce que je suis devenu, de par la rétroaction de mes actions paroles et pensées, va attirer à moi des relations sociales et des situations de même nature. Or, comme je ne peux tout régler mes problèmes en une seule journée, j’ai besoin de plusieurs vies pour mettre les choses en ordre, pour paraphraser Lessing (Archiati, 1996). Il faut donc, selon Steiner, élargir son champ visuel et considérer que les conséquences ne reviendront pas nécessairement en une seule vie mais en plusieurs. Il s’avère ainsi utile de regarder les choses différemment et de considérer que tout ce qui m’arrive en est ainsi parce que je l’ai voulu ainsi. Steiner propose l’exercice suivant : imaginez quelqu’un marchant sur le bord d’un toit et qui place une tuile détachée en équilibre sur le bord du toit, sur le point de tomber. Une fois redescendu, il passe sous le rebord du toit et la tuile lui tombe précisément sur la tête. Il a complètement oublié que c’était lui qui était à l’origine de son malheur. Deuxième étape de l’exercice : imaginons un homme, Steiner l’appelle « l’homme de pensée artificiel », aurait voulu exactement tout ce qui nous est arrivé au cours de notre vie, les coups durs comme les joies. On sera probablement porté à l’haïr. Or cet « homme de pensée artificiel » est ce qui se rapproche le plus du moi supérieur et du fonctionnement du karma, soutient Steiner (Archiati, 1996). C’est donc dire que le moi supérieur a choisi et voulu notre situation existentielle présente, en fonction du karma de notre vie antérieure.

Les élémentaux non sauvés et trop attachés

Le cosmos, la nature et l’être humain ne sont pas gouvernés par des lois mécaniques mais par des êtres spirituels. Parmi ces êtres spirituels, de plus élevés aux plus inférieurs, il est des esprits de la Nature ou élémentaux (fées, gnomes, sylphes, salamandres, ondines, etc.), de nature astrale et éthérique, cachés derrière le voile de la nature et qui s’occupent des cycles et éléments naturels (jours, mois lunaires, année solaire, etc.) et des planètes. Les êtres célestes des hiérarchies supérieures aux esprits de la Nature sont liés aux étoiles. Or ces esprits ne sont pas plus extraterrestres que nous puisque tout ce qui existe sur terre est lié aux étoiles et aux planètes ; tout être humain, par exemple, a sa propre étoile. La qualité de nos relations avec les êtres invisibles de la Nature dépend nos rapports avec la nature elle-même. Le mieux est de porter une attention sacramentale à ses cycles, tel que le cycle de l’année solaire et ses festivals (Noël, Pâques, la Saint-Jean, la Saint-Michel, l’Action de grâce) qui peut être suivi comme un chemin initiatique menant à une expérience du Christ. À cause de notre attitude mauvaise à l’égard de la nature, de l’incompréhension générale, de la paresse, de l’impatience, du matérialisme, de l’intellectualisme et de l’ignorance de ces cycles, les esprits de la Nature se sentent lésés. Même le karma interpersonnel implique des transactions d’esprits de la Nature, plus ou moins libérés et plus ou moins déchus et aigris. Ils s’attendent à ce qu’on les libère de leur esclavage à la matière en échange du sacrifice qu’ils ont fait lorsqu’ils se sont laissés ensorcelés dans les lois de la Nature (De Jong, 2001). S’ils n’ont pas été libérés par notre activité consciente, ils restent emprisonnés, attachés à nous, et nous suivent d’une vie à l’autre (Lievegoed, 1983). Lorsqu’on construit des machines, les circuits électriques et électroniques, on éjecte les esprits des éléments et les remplace par des esprits élémentaux ahrimaniens. L’esclavage des esprits de la Nature dans nos machines et nos conceptions matérialistes les rend « ahrimaniens », aigris, rigides, mécaniques et « sur-intellectualisés ». Comme le plastique synthétique est refusé par la terre et n'est pas décomposé, ainsi les pensées artificielles, étrangères au cosmos et à la nature, restent non digérées, non dissoutes, et reviennent nous hanter dans la vie suivante à cause de nos liens karmiques (Lievegoed, 1983). À l’inverse, avoir de bonnes relations avec la nature menant à une expérience des esprits de la Nature les libère et nous les prenons en nous en communion et non pas par attachement parasitaire. Les esprits de la Nature n’ont pas d’ego à eux et se moulent selon nos attitudes envers la vie et la nature.

Dans le corps humain et celui de la terre, l’activité des sept planètes ont chacune une correspondance avec des processus physiologiques précis et cette activité passe par l’intermédiaire des élémentaux ou esprits de la Nature. Les pensées, sentiments et impulsions de volonté sont eux aussi des formes astrales et éthériques, artificielles certes mais elles restent néanmoins des élémentaux. Les élémentaux, incluant les formes-pensées comme les esprits de la Nature, sont donc intimement liés à notre univers intérieur. Ils conservent une relation spéciale avec l’homme jusqu'à la mort et même après, dans l’intervalle entre deux vies et dans la vie suivante. Ils sont à l’origine de diverses expériences perturbatrices, à travers lesquels ils manifestent leur désir d’être considérés et transformés (Lievegoed, 193). Les médecins anthroposophes tels Bernard Lievegoed en tiennent comptent dans leur diagnostic et leur thérapeutique. Chaque fois qu’on se dit « Pourquoi ai-je agit comme ça ? Ce n'est pas moi ça! », on peut ressentir l’activité perturbatrice de ces êtres de la Nature – liés à notre univers intérieur - non sauvés (Lievegoed, 1983). Les élémentaux non sauvés s'interposent entre soi et les autres, empêchant de les rencontrer véritablement et donc de comprendre nos rapports karmiques avec eux. Les élémentaux non sauvés constituent ce que Steiner appelle le double ou « doppelganger », qui inclut tout ce qui est déchu en soi-même depuis la Chute - au niveau des trois corps inférieurs physique, éthérique, astral (Lievegoed, 1983). Le double ahrimanien prend généralement une forme humanoïde reptilienne, de couleur verte (voir les films L’incroyable Hulk, Le Grinch et Le Masque, suggère De Jong, 2000), alors que le double luciférien se présente comme un ange gracieux et essaie de se faire passer pour le moi supérieur. Le double est fait de toutes nos actions bonnes ou mauvaises et se charge de nous faire subir leurs conséquences. Il est en opposition avec le (vrai) moi supérieur comme un gardien du seuil séparant la conscience ordinaire du monde spirituel. Le double est un agrégat artificiel, une île que moi supérieur ne peut pénétrer de lui-même (Lievegoed, 1983). Le sens de la vie sur terre consiste à transformer ce double dans la vie ordinaire. Le moi supérieur pose dans notre vie les obstacles qui nous amèneront à confronter le double négatif de nos vies et le transformer (Lievegoed, 1983). Le nier et le réprimer ne fait que le renforcer. En acceptant ce qui nous arrive comme étant nécessaire et en prenant la responsabilité de transformer le double, on peut arriver à le dissoudre. Les fantômes par exemple sont des structures éthériques passées qui sèment la discorde dans les relations sociales et nos souvenirs (Lievegoed, 1983 : 85). Les structures négatives de nature astrale sont appelées démons et interfèrent dans l’âme sous forme de complexes et d’impulsions destructrices ou auto destructrices inconscientes, causant des sérieux troubles psychologiques et menant possiblement à la possession (Lievegoed, 1983). Tous demandent à être digérés dans l’action empreinte de compréhension et d’amour, des forces qui jaillissent du moi supérieur.


La clairvoyance atavique prise pour des souvenirs de vies antérieures

Pour Steiner, il existe deux sortes de clairvoyance différentes : la clairvoyance imaginative et la clairvoyance atavique. Steiner décrit la clairvoyance atavique comme étant un héritage héréditaire, liée au sang. Lorsqu’un individu voit sa conscience de veille affaiblie, par la somnolence, par l’hypnose, la transe ou le somnambulisme, il entre dans une conscience plus profonde reflétant les phénomènes cosmiques avec une grande clarté, une clarté supérieure à celle des rêves (Steiner, 1906). Or son activité cérébrale à lui est paralysée ; il ne peut alors qu’observer les images qui lui viennent de ses ancêtres de par son lien de sang (Steiner, 1906). Dans l’antiquité, les humains étaient naturellement doués de cette clairvoyance atavique et recevaient à travers elle des imaginations des dieux (Diet, 2002). Les prophètes et les Sibylles y puisaient l’inspiration de leurs discours. Le mélange des sangs entraîna le développement de l’intellect et la récession de la clairvoyance atavique (Steiner, 1906). Cette dernière a été refoulée par le christianisme et le matérialisme et cela devait en être ainsi car elle devait laisser place à une forme de connaissance non pas reçue passivement mais fondée sur l’activité de la pensée libre et autonome. La clairvoyance imaginative est celle qu’il s’agit de développer maintenant, à la lumière d’un état de conscience clair et éveillé, par la pensée pure, le contraire de la succession d’images née de la clairvoyance atavique. Aujourd’hui, la clairvoyance atavique est susceptible de faire monter à la conscience des images pouvant être mal interprétées et prises pour des souvenirs de vies antérieures. Ce serait d’ailleurs de telles images qui, par le passé, auraient été prises pour des souvenirs de vies antérieures (Archiati, 1996). Ces images, ces éléments psychiques, sont liées à nous comme des reflets de nos vies, or elles ne correspondent pas à des incarnations antérieures de notre ego (Diet, 2002). Les anciennes versions de la réincarnation, telles que la transmigration et la métempsycose, soit la transmission des éléments psychiques d’un corps à un autre, ne doivent pas être confondues avec la réincarnation du moi, laquelle ne peut être comprise, selon Steiner, que d’un point de vue chrétien (Archiati, 1996). Car selon lui, seul le christianisme insiste assez sur les rapports unissant l’humain individuel et universel, deux caractéristiques essentielles de la réincarnation du moi.

De nos jours, ce ne sont plus les dieux qui se manifestent à travers les imaginations ataviques, héréditaires, passives : à travers ces visions reçues passivement, des démons se jouent de nous aisément (Diet, 2002). Tout ce qui est de nature visionnaire constitue aujourd’hui un phénomène pathologique menant à ce que Steiner et la Théosophie appellent la huitième sphère (Steiner, 1915). Cette sphère est la huitième parce qu’elle est exclue du cycle des sept stades de l’évolution humaine-terrestre et constitue le « double » négatif de la Terre actuelle, laquelle correspond à la quatrième sphère (Steiner, 1915). La huitième sphère est l’Abîme, le lieu où tous les rebuts de l'évolution et tout le mal vont s’échouer. Lucifer et Ahrimane-Satan sont les deux grands ennemis de l’humanité à l’origine de la création « spirituellement illicite » de la huitième sphère, ce monde purement artificiel et spectral, mi-matériel mi-spirituel, en dehors de la vie et de la mort, de nature électromagnétique, rempli de fantômes et de spectres. Ensemble ils tentent de faire dévier le cours de l'évolution normale vers ce monde condamné. L’attrait pour ce qui est de nature visionnaire – né de la clairvoyance atavique - est « la manifestation d’un amour pervers pour la huitième sphère », affirme Steiner (Diet, 2002).

La réincarnation sans l'esprit: histoire d'une contre-vérité

Dans son ouvrage de controverse La réincarnation sans l'esprit: histoire d'une contre-vérité, l’anthroposophe Irene Diet (2002) soutient que le fait de prendre les images qui émergent dans un état infra-conscient pour des « souvenirs de vies antérieures » constitue une aberration de la recherche karmique :
« Et si les prétendues réminiscences de vies antérieures, qu'elles soient spontanées ou déclenchées par des techniques de régression étaient liées à d'autres phénomènes que la réincarnation? Et si ces "images de nos vies passées", loin de contribuer à une clarification des choses ne faisaient que jeter le trouble dans nos esprits, brouillant non seulement les cartes de nos destinées individuelles mais empêchant aussi une compréhension juste de la réincarnation et du karma? Et si ces images au lieu d'ouvrir la voie à une spiritualisation de l'humanité, faisaient le lit d'un monde plus matérialiste encore? » (verso de la couverture).


Les activités des « loges noires »

Irène Diet (2002) attire l’attention sur le contenu de quelques conférences de Rudolf Steiner, réunies dans The Occult Movement in the Nineteenth Century (1915), concernant l'activité des loges occultes au XIXe siècle et leur influence déterminante dans la création du spiritisme et du médiumnisme. Steiner (1915) relate une histoire de complot occulte dans laquelle des loges bien intentionnées et d’autres malintentionnées se seraient mises d’accord, au milieu du XIXe siècle, sur la nécessité de créer de toute pièces les phénomènes de médiumnité et de spiritisme, destinés à fournir des preuves physiques et scientifiques de l’existence du spirituel. Les loges bien intentionnées ont vite réalisé que les loges malintentionnées s’étaient empressées à monopoliser le spiritisme et la médiumnité. L’activité principale des loges occidentales malintentionnées consiste à répandre du matérialisme de façon à ce que les individus développent une forte tournure de pensée matérialiste. Après leur mort, les esprits matérialistes défunts se retrouvent coincés dans la loge, attachés aux mauvais initiés ayant répandu le matérialisme comme par les fils invisibles (Steiner, 1915). Or ces mauvais initiés ne sont pas dupes, ils connaissent les réalités spirituelles et savent que le fait de répandre des notions matérialistes entraîne des conséquences nuisibles pour l’humanité ainsi emprisonnée. Selon comment les mauvais initiés les utilisent, ces défunts coincés dans la loge deviennent de puissants centres de forces destructrices ou bien se manifestent dans les séances de spiritisme et de médiumnité (Steiner, 1915). Ce sont ces défunts placés en « salle d’attente » qui répondent aux questions des spirites et des médiums. À la lumière de ces explications de nature occulte, le cas de Bridey Murphy s’éclaire. Ceux qui ont lu À la recherche de Bridey Murphy (1975) savent que dans les années cinquante aux États-Unis une femme placée en état d’hypnose, Ruth Simmons, fut amenée à servir de porte-voix à une autre femme, Bridey Murphy, laquelle disait avoir vécu un siècle plus tôt. Cette Bridey Murphy, que l’on prit pour une incarnation antérieure de Ruth Simmons, dit se trouver dans une « salle d’attente » entre deux vies. En se fiant aux analyses de Diet, rigoureusement fondées sur les enseignements de Steiner, on peut en déduire qu’une interprétation anthroposophique du phénomène serait que l’« affaire Bridey Murphy », de même que les autres thérapies du même genre, sont le fruit des manigances de ces fameuses « loges occultes malintentionnées », désireuses de répandre du matérialisme, notamment de faux enseignements sur le karma et la réincarnation. La popularité des thérapies de régression sous hypnose et de lying est, selon Diet, une manifestation plus récente des activités des loges occultes malintentionnées et de bien d’autres forces occultes. Elle rappelle de plus qu’Edgar Cayce n’avait jamais considéré l’idée de faire des « lectures de vies antérieures » avant qu’un certain Arthur Lammers, lié au mouvement médiumnique international et à la Société Théosophique, lui fasse la suggestion en 1923.

Les loges noires d’Orient (indo-tibétaines) et d’Occident (ressemblant aux Jésuites et aux Francs-maçons) ont aussi réussi un autre coup de génie : faire dévier le théosophisme vers une haine de Yahvé et du Christ (Steiner, 1915). Le Théosophe O.P. Sinnett, l’auteur de Bouddhisme ésotérique (1888), identifie la huitième sphère à la lune - une création de l’Elohim Yahvé -, ce qui laisse sous-entendre que Yahvé serait le créateur de la huitième sphère (Steiner, 1915). Steiner affirme quant à lui que Yahvé aurait créé la lune, très minéralisée, comme contrepoids au vacuum de la huitième sphère fabriquée par Lucifer et Ahrimane (Steiner, 1915). Selon Steiner (1915), Blavatsky, de par ses dons de clairvoyance, était consciente de l’erreur de Sinnett et elle aurait tenté de la corriger, mais en vain. À travers l’ouvrage de Sinnett, qui eut énormément d’influence dans la Théosophie, les loges malintentionnées, tant orientales qu’occidentales, ont pu jeter ainsi un voile d'obscurité sur le rôle véritable de Yahvé - Élohim lunaire - dans le devenir humain. Ils ont du même coup jeté un voile d’obscurité sur le rôle des six autres Élohim (liés aux six autres sphères planétaires) qui guident l’évolution de l’individu à travers les sphères des planètes dans l’intervalle entre deux vies, qui se chargent de la transformation du karma individuel et qui donnèrent forme au cosmos (ce sont les Élohim ou Exousiai ou Esprit de la Forme), aux planètes et à l’être humain (Steiner, 1915 ; Diet, 2002).

Madame Blavatsky ne parle pas de réincarnation dans son premier grand ouvrage Isis Dévoilée. Elle était dans ce temps-là inspirée par des initiés rosicruciens bienveillants, or elle n’était pas encore arrivée au degré d’initiation où les réalités de la réincarnation sont révélées. Ce n’est qu’à partir de la Doctrine Secrète que Blavatsky répand des enseignements sur la réincarnation, or ceux-ci furent révélés par les loges noires indo-tibétaines et non plus par les rosicruciens. Ceux-ci l’avaient délaissée parce qu’elle s’était révélée trop instable et manipulée par les loges désireuses de détourner l’homme de l’impulsion de Yahvé et du Christ. Aux dires de Diet (2002), c’est Steiner qui aurait été choisi par les loges rosicruciennes bienveillantes pour mettre de l’ordre dans le karma et la réincarnation et réparer les erreurs de Sinnett et Blavatksy. Son ouvrage Science de l’Occulte constitue un véritable livre de combat destiné à « dissiper l’obscurité qui entoure la question de la réincarnation » (Steiner, 1910). Ce n’est qu’en 1915 que Steiner révéla, dans ses conférences, l’activité des loges noires orientales et occidentales et celle de Lucifer et Ahriman dans la création de la huitième sphère.

Les deux types de clairvoyance

Diet (2002) insiste sur la différence fondamentale qui existe entre le développement de la clairvoyance imaginative et la clairvoyance atavique. L’Imagination correspond au niveau immédiatement supérieur à la conscience de veille. Si elle est bien maîtrisée, elle peut mener à l’Inspiration, puis à l’Intuition, qui correspond au plus haut degré de clairvoyance. L’Imagination au sens steinerien, ou clairvoyance imaginative, ne doit rien à l’imagination au sens fantaisiste ni à l’autosuggestion : elle consiste en la capacité de créer une forme-pensée pure, indépendante des sens, construite par notre propre effort de volonté, en vue que des êtres spirituels se manifestent à travers elle (1905). Son antithèse la clairvoyance atavique ou clairvoyance visionnaire appartient au passé mais persiste encore, autrefois utilisée par les dieux mais aujourd'hui dirigée par des démons. Elle est dangereusement trompeuse du fait qu’elle imite parfaitement les impressions sensorielles, comme au cinéma, affirme Diet (2002). L’humain moderne doit développer son âme de conscience, un degré supérieur de conscience de l’âme en voie de spiritualisation. Pour y arriver, il faut avoir acquis un savoir solide basé sur l'expérience concrète du moi et non pas un savoir basé sur la clairvoyance visionnaire, atavique, car cette dernière doit s’éclipser pour le sain développement de l’intellect et du moi. Un moi sain doit fonder sa liberté sur la connaissance directe ; un savoir fondé sur les visions, qui imite le réel mais reste néanmoins un simulacre saisissant de réalité, court-circuite la formation d'un sens du moi sain (Diet, 2002 : 64). Dans le passé, les dieux dirigeaient les humains à travers les imaginations ataviques ; dans le futur, l’homme se dirigera lui-même par la clairvoyance imaginative, développée par son propre effort de pensée pure. Diet (2002 : 62-67) en conclut que pour obtenir une compréhension juste de la réincarnation et du karma, il faut absolument écarter les visions obtenues dans un état de conscience réduit comme l’hypnose ou le lying car celles-ci nous amènent carrément en sens inverse du développement de la clairvoyance Imaginative selon Steiner. Les visions issues de la clairvoyance atavique sont des symptômes pathologiques et nous rabaissent à l'infra-conscient, lequel mène à l’infrahumain. Pis encore, la clairvoyance atavique nous place sur la pente dangereuse menant à la huitième sphère (Steiner, 1915).

Les investigations karmiques et la notion de symptôme karmique

Dans un même ordre d’idées, Diet (2002) oppose, tout au long de son ouvrage, la démarche d’ « investigation karmique » de Steiner, très longue et ardue, à celle des « thérapies de vies antérieures », qui aboutit rapidement et facilement à des images, des scènes, prises immédiatement pour des souvenirs de vies antérieures et dont les résultats positifs apparaissent rapidement. Or, selon Diet (2002), ces thérapies ne touchent pas au véritable phénomène de la réincarnation du moi : elle jongle avec des éléments psychiques, les visions qui jaillissent de la clairvoyance atavique. Elle souligne que Steiner écarte la majorité des visions qui lui viennent en tête comme autant de fausses pistes, puisqu’elles seraient « trop nombreuses pour être vraies » (Diet, 2002 : 21). Ce serait en raison de la persistance des facultés de clairvoyance instinctive, atavique, héréditaire, que ces « images trompeuses » montent à la conscience. Le travail de clairvoyance imaginative consiste à trier les bonnes imaginations des visions d’origine ataviques. Les observations de Steiner touchent les traits de la personnalité profonde de l’individu – du moi - et leur transformation d'une vie à l'autre (Diet, 2002). Les observations des thérapeutes en régression Patrick Drouot, Jenny Cockel, Trutz Hardo et Yonassan Gershom portent quant à elles, le plus souvent, sur l’origine de maladies présentes, censées déboucher sur un ou des traumas vécus dans une autre vie (Diet, 2002). Les maladies physiques, le mal-être psychique (anxiétés, cauchemars récurrents) et les ressemblances physiques et psychiques sont interprétés par ces thérapeutes comme étant des symptômes de karma (Diet, 2002). Or ceux-ci ne correspond en rien à aux « symptômes » tels que décrits par Steiner. Selon Steiner, les traits psychiques et physiques sont complètement transformés par les hiérarchies spirituelles dans l’intervalle entre deux vies et les ressemblances physiques et psychiques ne permettent pas de retrouver la réincarnation d’un individu décédé. Les symptômes qu’il observe concernent le moi de l’individu et non pas des ressemblances ou des continuités d’ordre psychophysiques. La conception de la réincarnation qui ressort des « thérapies de vies antérieures » suggère l’absence de transformation entre deux vies, le retour mécanique de l'acte à son émetteur et la quasi-insignifiance de l’intervalle entre deux vies (Diet, 2002). Pour Steiner en revanche, l’intervalle dure environ 1000 ans et l’individu en revient complètement transformé. Diet (2002), en décrivant le passage à travers les sept sphères planétaires (à ne pas confondre avec les sept stades de développement de la Terre), insiste sur le fait que les blessures morales sont abandonnées dans la sphère de Mercure et complètement guéries. Ce sont les faiblesses morales et non pas les maladies qui reviennent sous forme de karma à compenser. Par ailleurs, prétendre qu’on doive guérir l’individu de séquelles morales, psychiques et physiques venant d’une autre vie par une « thérapie de réincarnation » suppose que ces séquelles ne sont pas transformées dans l’intervalle entre deux vies (Diet, 2002). S’appuyant sur Steiner, elle soutient que l’être est radicalement transformé entre deux vie par son passage dans la sphère Solaire, où la pensée devient le corps et le corps devient la pensée, et donc que les ressemblances physique, psychiques et morales ne permettront jamais de prétendre qu’un individu est la réincarnation d’un autre.

Prenons un exemple concret. Selon Trutz Hardo, « thérapeute des vies antérieures », sa cliente Marion, atteinte d’une maladie du cœur, aurait vécu à nouveau, en état semi hypnotique « alpha », des « souvenirs d’une vie antérieure » démontrant que la cause de sa maladie du cœur sera la conséquence karmique du fait qu’elle a poignardé quelqu’un au cœur dans une autre vie (Diet, 2002 : 11-12). La conception du karma qui émerge de cette thérapie est que le karma reviendrait inchangé, comme par automatisme mécanique. Diet (2002) explique que Lucifer et Ahrimane se sont emparés de la clairvoyance atavique, notamment afin de développer une fausse idée de la réincarnation et d’entraîner le plus de gens vers la huitième sphère. Ahrimane est l'inspirateur de cette conception mécaniste de la réincarnation et du karma, qui enferme l'humain sur terre, pris dans ses perpétuels enchevêtrements karmiques… « jusqu’à ce qu’on l’en soulage en libérant le trauma en salle de thérapie ». Face à cette vision mécaniste et quasi cauchemardesque du karma et de la réincarnation, l’homme est soudain pris du désir – inspiré par Lucifer - de fuir ce monde de karma étouffant, de se détacher de la terre et de la matière pour s'affranchir du « cycle infernal » des incarnations successives (Diet, 2002 : 49). C’est généralement à de telles conceptions de la réincarnation qu’aboutissent les thérapies des vies antérieures, souligne Diet (2002).

Hypnose, psychanalyse et magie noire

Ces thérapies sont d’autant plus douteuses pour un anthroposophe averti que Steiner condamnait catégoriquement l’hypnose. Les suggestions déclenchent un transfert au niveau de l’éthérique – l’éthérique étant porteur de la mémoire et des souvenirs – par lequel, les instincts, les présupposés et les pensées les plus intimes de l’hypnotiseur se reflètent dans la psyché du patient et ce sans même qu’il ait eut à suggérer quoi que ce soit (Steiner, 1905 : 12). L’hypnose est un jeu très dangereux car elle réitère et durcit des structures de pensée attendront les pratiquants et les patients après la mort, intriqués dans leurs liens karmiques et prisonniers du monde illusoire, de la même nature que la huitième sphère, qu’ils ont structuré au fil des séances (Steiner, 1905 : 12). L’hypnose non seulement transgresse les limites établies par la conscience de veille, tel un viol psychique, elle se révèle de plus une influence destructrice de la volonté et du libre-arbitre. Steiner considère l’hypnose comme un euphémisme pour « magie noire » et manipulation mentale. Le médium, le spirite et l’hypnotiseur sont des magiciens noirs inconscients car des élémentaux ahrimaniens s’infiltrent dans leurs « émanations chimiques » ou « ectoplasme » (Steiner, 1924 : 161). Quant au mage noir conjurant ses esprits familiers à entrer dans ses émanations afin d’en obtenir du pouvoir, celui-ci attire de façon pleinement intentionnelle des élémentaux ahrimaniens. Steiner met aussi en garde contre la psychanalyse de son temps, qui utilisait abondamment la régression sous hypnose dans les souvenirs d’enfance. Steiner soutient que d’éveiller et manipuler des souvenirs réprimés, c’est jouer avec de véritables bombes dans une psyché déjà fragile. Le reste de sa vie et même après la mort, le patient restera emprisonné dans les structures psychanalytiques, pleines de complexes freudiens, qu’il se sera créé dans son imagination (Steiner, 1917 : 10). Il nourrit ainsi des complexes, des fragments indépendants de lui-même, de véritables démons qui s’habillent de ses souvenirs (Steiner, 1917 : 10). Si Steiner condamnait la psychanalyse et l’hypnose, à combien plus forte raison n’aurait-il pas condamné avec vigueur les « thérapies de vies antérieures » ?

Le drame-mystère de Steiner : une clé pour notre compréhension de la réincarnation
Dans le quatrième drame mystère de Steiner, rappelle Prokofieff (1995), directeur de la Société Anthroposophique Générale, les personnages Capésius, Maria et Johannes consultent des « pseudo occultistes » :
“And the soul will then appear as an occultist
and when telled upon will tell human beings
their lives from the primeval beginnings of the Earth.” (Prokofieff, 1995: 14)

Ainsi, Capésius, Maria et Johannes tentent d'arriver à une connaissance du karma, mais succombent momentanément aux illusions semées par des êtres spirituels nuisibles qui leur racontent leurs vies antérieures dans des séances d’occultisme. S.O. Prokofieff (1995 : 14), interprète la scène en citant Steiner, qui a révélé que ces enseignements offerts par des entités ahrimaniennes (sataniques) mèneront l'humanité à sa décadence parce qu’elle le reçoit passivement, sans se transformer intérieurement. Plus tard, Capésius devra reconnaître que les images qui lui venaient dans un état infra-conscient - en deçà de l'état de conscience de veille - étaient illusoires, n'étant pas connectées à une expérience consciente du « Minuit de l'Existence » (la rencontre du Moi avec le Christ Représentant de l'Humanité au milieu de l’intervalle entre deux vies), et donc qu’il ne peut s’agir d’une compréhension valide de la réincarnation et du karma (Prokofieff, 1995 : 15). Toutefois, seule Maria arrivera, dans le quatrième drame-mystère, à une compréhension réelle de la réincarnation fondée sur le mystère du Minuit de l’Existence, acquerrant ainsi un savoir fiable sur son propre karma (Prokofieff, 1995 : 15).

En résumé, Steiner et certains anthroposophes avertissent le lecteur qu’il y a un danger de confusion et d’illusion inhérent à toute investigations portant sur les vies antérieures. Fonder sa compréhension du karma et de la réincarnation sur des visions originaires de la clairvoyance atavique en est un exemple. Derrière ces visions ataviques se cacheraient des êtres ahrimaniens, eux-mêmes manipulés par des mauvais initiés souhaitant répandre de fausses conceptions de la réincarnation et du karma. En répandant du matérialisme ainsi qu’une mauvaise compréhension du karma et de la réincarnation, ces occultistes emprisonneraient toujours plus de défunts dans leur loge, leur « salle d’attente », et conduisent ensuite ces défunts vers les séances de spiritisme, de médiumnisme. Les êtres spirituels ahrimaniens utilisent ensuite les souvenirs de ces défunts et les dévoilent dès qu’on ouvre la porte de la clairvoyance atavique, par exemple lors des séances de transe hypnotique et de régression sous hypnose dans des « vies antérieures ». La popularité des thérapies de régression sous hypnose et de lying est, selon Diet (2002), une manifestation plus récente des activités des loges occultes malintentionnées. En inspirant des conceptions fausses de la réincarnation et du karma, les loges malintentionnées créent des démons, car les mensonges donnent vie à des démons et les démons nous ramènent à un stade dépassé de notre évolution, dans la clairvoyance atavique qui devrait déjà être du passé. Ces loges sont elles-mêmes inspirées plus ou moins directement par Lucifer et Ahrimane, qui veulent entraîner l’humanité dans la huitième sphère et ainsi faire échouer toute l’évolution humaine-terrestre. C’est donc dire qu’une mauvaise compréhension du karma et de la réincarnation, parce qu’elle court-circuite le processus de saine acquisition de la connaissance en se fondant sur des mensonge et des phénomènes pathologiques, menace le passage de la terre et de l’humanité à la nouvelle Jérusalem, ou Jupiter, la prochaine étape de l’évolution humaine-terrestre.


DOCUMENTAIRE VIDEO :

La réincarnation et l'occident de Claude Graton :

https://www.dailymotion.com/video/x8ledew



BIBLIOGRAPHIE :

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